Résumé de la 17e partie n Faisant fi des avertissements de l?assistance effarée, Djiwân le Kourde, l?un des 40 bandits, se servit à satiété dans le plat de riz à la crème. A cette vue, le mangeur de haschisch leva les bras et s'écria : «Qu'Allah nous protège ! Il a englouti le plateau d'une seule bouchée. Grâces soient rendues à Allah qui ne m'a pas créé riz au lait ou cannelle ou autre chose semblable entre ses mains !» Et il ajouta : «Laissons-le manger à son aise, car déjà je vois sur son front se dessiner l'image de l'écorché et du pendu qu'il sera !» Puis il se mit encore plus hors de portée de la main du Kourde, et lui cria : «Puisse ta digestion s'arrêter et t'étouffer, ô effroyable abîme !» Mais le Kourde, sans prêter attention à ce qui se disait autour de lui, plongea une seconde fois ses doigts, aussi gros que des matraques, dans la masse tendre qui s'entrouvrit avec un claquement sourd et il les retira avec, au bout, une grosse boule telle une courge ; et il la faisait déjà tourner dans sa paume avant que de l'engloutir quand Zoumourroud dit aux gardes : «Vite, amenez-moi l'homme au riz avant qu'il n'avale la bouchée !» Et les gardes bondirent sur le Kourde qui ne les voyait pas, courbé qu'il était de toute la moitié du corps sur le plateau. Et ils le renversèrent avec agilité et lui lièrent les bras derrière le dos et le traînèrent devant le roi, tandis que les assistants se disaient : «Il a voulu lui-même sa propre perte. Nous lui avions bien conseillé de s'abstenir de toucher à ce néfaste riz à la crème !» Lorsqu'il fut devant elle, Zoumourroud lui demanda : «Quel est ton nom ? Quel est ton métier ? Et quel motif t'a poussé à venir dans notre ville ?» Il répondit : «Je m'appelle Othmân et je suis jardinier de mon métier. Quant au motif de ma venue, c'est la recherche d'un jardin où travailler pour manger !» Zoumourroud s'écria : «Qu'on m'apporte la table de sable et la plume de cuivre !» Et lorsqu'elle eut les objets entre les mains, elle traça avec la plume des caractères et des figures sur le sable étalé, réfléchit et calcula une heure de temps, puis releva la tête et dit : «Malheur à toi, misérable menteur ! Mes calculs sur ma table de sable m'apprennent que de ton vrai nom tu t'appelles Djiwân le Kourde et que de ton métier tu es bandit, voleur et assassin ! Ah ! cochon, fils de chien ! avoue tout de suite la vérité, ou les coups te la feront retrouver !» En entendant ces paroles du roi, qu'il était loin de soupçonner d'être l'adolescente ravie naguère par lui, il devint jaune de teint et ses mâchoires claquèrent et ses lèvres se contractèrent sur des dents qui apparurent tels des crocs de loup ou de quelque bête sauvage. Puis il pensa sauver sa tête en avouant la vérité, et dit : «Tu dis vrai, ô roi ! Mais je me repens sur tes mains dès cet instant et je serai à l'avenir dans la bonne voie !» Mais Zoumourroud lui dit : «Il ne m'est pas permis de laisser vivre une bête malfaisante sur le chemin des musulmans !» Puis elle ordonna : «Qu'on l'emmène et qu'on l'écorche vif et qu'on l'empaille pour le clouer sur la porte du pavillon et qu'on fasse subir à son cadavre le même sort qu'à celui du chrétien !» Lorsque le mangeur de haschisch vit les gardes emmener l'homme en question, il se leva et tourna le dos au plateau de riz et dit : «O riz à la crème, ô saupoudré de sucre et de cannelle, je te tourne le dos car, ô plat de malheur, je ne te juge pas digne de mon regard ...» A ce moment de sa narration, Schahrazade vit apparaître le matin et se tut discrètement. Mais lorsque fut la trois cent vingt-septième nuit, elle dit : «...Car, ô plat de malheur, je ne te juge pas digne de mon regard, et à peine de mon dos ! Je crache sur toi et t'abomine !» Et voilà pour lui. (à suivre...)