Résumé de la 19e partie n Zoumourroud désespérait de retrouver son bien-aimé quand elle le vit arriver et se mettre à la table où était servi le riz à la crème. «Le faix de la douleur pèse sur un dos qui ne peut le tolérer, sur un c?ur épuisé par le désir d'aimer, par la passion sans chemin et par les veilles continues. «Seigneur Dieu, est-il encore moyen de me venir en aide ? Hâte-toi de me secourir avant que le souffle dernier de vie ne s'exhale d'un corps exténué !» Alischar resta donc en cet état sans espoir de guérir comme sans espoir de revoir Zoumourroud. Et la bonne vieille ne savait plus comment faire pour le tirer de sa torpeur, quand un jour elle lui dit : «Mon enfant, ce n'est point en continuant à te lamenter sans sortir de ta maison que tu pourras retrouver ton amie. Si tu veux me croire, lève-toi et raffermis tes forces et sors la chercher dans les villes et les contrées. On ne sait jamais le chemin d'où peut venir le salut !» Et elle ne cessa de l'encourager de la sorte et de lui donner de l'espoir qu'elle ne l'eût obligé à se lever et à entrer au hammam, où elle lui donna elle-même le bain, et lui fit boire des sorbets, et lui fit manger un poulet. Et elle continua pendant un mois à le traiter de la sorte, si bien qu'il finit par être en état de voyager. Alors il fit ses adieux à la vieille, après avoir terminé ses préparatifs de départ, et se mit en route à la recherche de Zoumourroud. Et c'est ainsi qu'il finit par arriver dans la ville où Zoumourroud était roi, et par entrer dans le pavillon du festin et s'asseoir devant le plateau de riz à la crème saupoudré de sucre et de cannelle. Comme il avait une grande faim, il releva ses manches jusqu'aux coudes, dit la formule «Bismillah» et se disposa à manger. Alors ses voisins, apitoyés de voir à quel danger il s'exposait, le prévinrent qu'il lui arriverait certainement malheur s'il avait la mauvaise chance de toucher à ce mets. Et, comme il s'obstinait, le mangeur de haschisch lui dit : «Tu seras écorché et pendu, prends garde !» Il répondit : «Bénie soit la mort qui me délivrera d'une vie pleine d'infortunes ! Mais auparavant, je veux manger de ce riz à la crème !» Et il tendit la main et se mit à manger de grand appétit. Tout cela ! Et Zoumourroud qui, tout en émoi, l'observait, se dit : «Je veux d'abord le laisser assouvir sa faim, avant que de le faire venir !» Et lorsqu'elle vit qu'il avait cessé de manger, et qu'il avait prononcé la formule : «Le merci à Allah !» elle dit aux gardes : «Allez trouver tout doucement ce jeune homme qui est assis devant le plateau de riz à la crème, et priez-le, avec beaucoup de bonnes manières, de venir me parler, en lui disant : ?Le roi vous demande pour une question et sa réponse, sans plus !?» Et les gardes vinrent s'incliner devant Alischar et lui dirent : «Seigneur, notre maître le roi te demande pour une question et une réponse, sans plus !» Alischar répondit : «J'écoute et j'obéis !» Et il se leva et les accompagna devant le roi. Pendant ce temps, les gens du peuple faisaient entre eux mille conjectures. Les uns disaient : «Quel malheur pour sa jeunesse ! Qui sait ce qui va lui arriver !» Mais les autres répondaient : «S'il devait lui arriver malheur, le roi ne l'aurait pas laissé manger à satiété ! Il l'aurait fait arrêter dès la seconde bouchée !» Et d'autres disaient : «Les gardes ne l'ont pas traîné par les pieds ou par les habits ! Ils l'ont accompagné, en le suivant respectueusement à distance !» (à suivre...)