Résumé de la 7e partie n C?est au tour de Houria-du Paradis d?entrer dans l?arène pour étaler ses dons d?oratrice. Alors la mince et svelte adolescente regarda la grasse Pleine-Lune en souriant et lui dit : «Louanges à Allah qui m'a créée en me donnant la forme du flexible rameau du peuplier, la souplesse de la tige du cyprès et le balancement du lis ! «Lorsque je me lève, je suis légère ; lorsque je m'assieds, je suis gentille ; lorsque je plaisante, je suis charmante. Mon haleine est douce et parfumée, car mon âme est simple et pure de tout contact épaississant. «Je n'ai jamais, ô grasse, entendu un amant louer sa bien-aimée en disant : ?Elle est énorme comme l'éléphant; elle est charnue comme une montagne est haute !? «En revanche, j'ai toujours entendu l'amant, pour dépeindre sa bien-aimée, dire : ?Sa taille est mince et souple et élégante. Sa démarche est si légère que ses pas s'impriment à peine sur le sol ! Peu de chose suffit à la nourrir, et quelques gouttes d'eau apaisent sa soif. Ses jeux et ses caresses sont discrets, et ses embrassements pleins de volupté. Elle est plus agile que le moineau et plus vive que l'étourneau ! Elle est flexible comme la tige du bambou ! Son sourire est gracieux et gracieuses sont ses manières. Si je l'attire à moi, c'est sans faire d'effort. Et quand elle se penche sur moi, elle s'incline délicatement ; et si elle s'assied sur mes genoux, elle ne tombe pas lourdement, mais elle se pose comme une plume d'oiseau !? «Sache donc, ô grasse, que c'est moi la svelte, la fine, pour qui brûlent tous les c?urs. C'est moi qui inspire les passions les plus violentes et qui rends fous les hommes les plus sensés ! «C'est moi enfin qu'on compare à la vigne grimpante autour du palmier, qui s'enlace à la tige avec tant de nonchalance. C'est moi, la gazelle svelte aux beaux yeux humides et languissants. Et mon nom de Houria n'est point usurpé ! «Quant à toi, ô grasse, laisse-moi maintenant te dire tes vérités...» A ce moment de sa narration, Schahrazade vit apparaître le matin et, discrète, se tut. Mais lorsque fut la trois cent trente-septième nuit, elle dit : «... Quant à toi, ô grasse, laisse-moi maintenant te dire tes vérités. «O monceau de graisse et de chair, quand tu marches, c'est comme le canard ; quand tu manges, c'est comme l'éléphant. Dans le repos tu es intraitable. «Tu n'as guère l'air de te douter que, grasse comme tu es, tu n'es bonne que comme viande de boucherie ! «Ton âme est aussi grossière que ton corps. Ta plaisanterie est si pesante qu'elle suffoque. Tes jeux sont si lourds qu'ils tuent. Et ton rire si épouvantable qu'il fracasse les os de l'oreille. «Si ton amant soupire dans tes bras, tu peux à peine respirer ; s'il t'embrasse, tu es moite et gluante de sueur. «Lorsque tu dors, tu es ronflante; lorsque tu veilles, tu souffles comme un buffle ; tu peux à peine changer de place et lorsque tu reposes, tu es un fardeau pour toi-même. Ta vie se passe à mouvoir tes mâchoires comme la vache et à régurgiter comme le chameau. «Si l'on te regarde par-devant, tu es comme l'éléphant ; si l'on te regarde de côté, tu es comme le chameau ; et si l'on te regarde par-derrière, tu es comme une outre gonflée. «Enfin c'est de toi certainement que le poète a dit : ?Elle est lourde comme une vessie gonflée d'urine ; ses cuisses sont deux contreforts de montagne et sa démarche ébranle le sol comme un tremblement. ?Mais si elle vient à crier en Occident, l'Orient entier en retentit !?» A ces paroles de Houria-du-Paradis,Ali El-Yamani, son maître, lui dit : «En vérité, ô Houria, ton éloquence est notoire ! Et toi, Pleine-Lune, ton langage est admirable. Mais maintenant il est temps de regagner vos places afin de laisser parler la blonde et la brune !» (à suivre...)