Résumé de la 122e partie n Mais, malgré tout, Daoul'makân continuait à être triste d'être séparé de son frère, et il s'en ouvrit un jour à son vizir Dandân et lui demande : «Que faire, pour oublier ces chagrins.» Et le roi Soleïmân-Schah continua à gouverner de la sorte durant un très long espace de temps, dans la prospérité et entouré de l'affection de tout son peuple. Mais il ne manquait à son bonheur qu'une femme et des enfants, car il était célibataire. Et le roi Soleïmân-Schah avait un vizir qui lui ressemblait beaucoup par ses qualités de libéralité et de bonté. Aussi un jour que sa solitude lui pesait plus que de coutume, le roi fit appeler son vizir et lui dit : «Mon vizir, voici que ma poitrine se rétrécit et ma patience s'épuise et mes forces diminuent ; quelque temps encore ainsi, et je n'aurai plus que la peau sur les os. Car je vois bien à présent que le célibat n'est point un état de nature, surtout pour les rois qui ont un trône à transmettre à leurs descendants. Et, d'ailleurs, notre Prophète béni (sur lui la prière et la paix !) a dit : ”Copulez et multipliez vos descendants, car je me glorifierai de votre nombre, devant toutes les races, au jour de la Résurrection !” Conseille-moi donc, ô mon vizir, et dis-moi ce que tu en penses.» Alors le vizir lui dit : «En vérité, ô roi, c'est là une question fort difficile et d'une délicatesse extrême. J'essaierai de te satisfaire en restant dans la voie prescrite. Sache donc, ô roi, que je ne verrais point avec agrément une esclave inconnue devenir l'épouse de notre maître ; car comment pourra-t-il connaître l'origine de cette esclave et la noblesse de ses ascendants et la pureté de son sang et les principes de sa race, et comment pourra-t-il, par conséquent conserver intacte l'unité impolluée du sang de ses propres ancêtres ? Ne sais-tu que l'enfant qui naîtra d'une telle union sera toujours un bâtard plein de vices, menteur, sanguinaire, maudit d'Allah, son créateur, à cause de ses abominations futures ? Et une pareille souche ressemble à la plante qui pousse dans un terrain marécageux à l'eau saumâtre et stagnante, et qui tombe en pourriture avant même d'atteindre à sa pleine croissance. Aussi n'attends point de ton vizir, ô roi, le service de t'acheter une esclave, fût-elle la plus belle adolescente de la terre ; car je ne veux pas être la cause de pareils malheurs et supporter le poids des péchés dont j'aurais été l'instigateur. Mais, si tu veux écouter ma barbe, je serais d'avis de choisir, parmi les filles des rois, une épouse dont la généalogie fût connue et la beauté donnée en exemple aux yeux de toutes les femmes !» A ces paroles, le roi Soleïmân-Schah dit : «O mon vizir, je suis tout prêt, si tu parviens à me trouver une femme pareille, à la prendre pour épouse légitime afin d'attirer sur ma race les bénédictions du Très-Haut !» Alors le vizir lui dit : «Ton affaire, grâce à Allah, est déjà toute faite.» Et le roi s'écria : «Comment cela ?» Il dit : «Sache, ô roi, que mon épouse m'a raconté que le roi Zahr-Schah, maître de la Ville-Blanche, a une fille d'une beauté sans égale et dont la description est tellement au-dessus des paroles que ma langue deviendrait poilue avant de pouvoir t'en donner la moindre idée !» Alors le roi s'écria : «Ya Allah !» Et le vizir continua : «Car, ô roi, comment pourrais-je jamais te parler dignement de ses yeux aux paupières de couleur brune, de ses cheveux, de sa taille si fine qu'elle en est invisible, de la lourdeur de ses hanches et de ce qui les soutient et les arrondit ? Par Allah ! Nul ne peut l'approcher sans rester en arrêt, comme nul ne peut la regarder sans mourir ! Et c'est d'elle que le poète a dit : «O vierge au ventre d'harmonie ! Ta taille mince défie le rameau pliant du jeune saule et la sveltesse même des peupliers du paradis. (à suivre...)