Célébrité n Artisan chevronné, Hadj Karaghli est l?un des derniers luthiers de toute la région sud-ouest du pays. Sa renommée a dépassé les frontières de sa région natale. Hadj Karaghli n?est pas un simple artisan, c?est un véritable artiste dans son genre. Ses mains fabriquent toutes sortes d?instruments à cordes aussi bien traditionnels tels que les goubris, hadjhoudj, sissan que les luths ou les qanouns dont l?usage est fort répandu dans les formations musicales locales. Avec un outillage rudimentaire, il débite le bois, le façonne, l?assemble et le polit dans son atelier installé au premier étage de sa maison. Il y a quelques années, il a même ouvert une boutique où il expose ses produits, non seulement les instruments de musique, mais également des bibelots en bois, des objets traditionnels en miniature. Ces produits suscitaient, dans un passé récent, la curiosité et l?engouement non seulement des Bécharis, mais aussi des habitants des autres régions du pays de passage dans la capitale de la Saoura ou installés provisoirement pour des besoins professionnels. Depuis que les services des impôts lui ont réclamé la somme de 450 000 DA, il s?est trouvé contraint de fermer. L?artisan-artiste s?est reconverti en salarié. Il est chauffeur dans une entreprise de travaux publics. «Il faut bien nourrir sa famille. De toute façon, les affaires allaient très mal. Le bois de qualité n?est pas toujours disponible», indique-t-il avec la sagesse et la philosophie propres aux gens du Sud. L?artiste ne baisse pas les bras. Il ne veut pas céder à la fatalité et au pessimisme. «Je continue à fabriquer des instruments de musique pour le plaisir et pour ne pas perdre la main», ajoute avec un brin d'humour l?artisan, qui a appris le métier chez un Cairote, au cours d?un séjour de deux ans en Egypte. Hadj Karaghli, à ses moments perdus, répare des instruments et façonne, de temps à autre, un luth, un goubri ou un qanoun, mais sans les commercialiser. Ce contact avec le bois, les longues heures de dur labeur passées à «rendre» un instrument de musique, lui procurent d?intenses moments de bonheur et de plaisir. Son atelier exigu est envahi par des instruments, dont certains sont inachevés. Dans l?attente des jours meilleurs, il continue à jouer de la flûte, son instrument favori, tout en songeant à reprendre son activité de luthier dès sa retraite. «J?aurai plus de temps encore à consacrer à mon activité artisanale», indique-t-il avec un sourire complice qui exprime son grand amour pour le folklore.