Décor n La petite placette, au centre d?El-Harrach, divise pratiquement la ville en deux parties, le côté droit en allant vers Boumati est curieusement délabré, l?autre donne un meilleur visage avec des immeubles de style colonial, encore solides. En se rendant vers les quartiers populaires, le visiteur est soudainement propulsé dans une réalité agressive. Les gens, par petits groupes s?entassent devant leur cage d?immeubles délabrés ou dans les cafés pleins à toute heure de la journée. Chacun occupe son temps, comme il peut. Ici, beaucoup de jeunes touchent aux drogues, seul moyen, de supporter, cette «lourde existence». Pour une fois chômeurs et non-chômeurs sont d?accord sur un point : aucune distraction dans cette commune. Alors, on se rabat sur les cafés, connus pour abriter de longues parties de cartes et de dominos. Le chemin qui mène au fameux marché Boumati, grouille de monde. D?un pas pressé, la foule se dirige vers cette «mecque» de marchandises illicites. La rue Malika- Gaïd en donne un avant-goût, aux clients. Sur la longueur de la rue, les vendeurs posent leurs maigres marchandises sur des bâches : des fragments de pièces de rechange, de pièces d?électronique, des postes radios d?occasion sont cédés à des prix défiant toute concurrence. Plus loin, le légendaire marché de Boumati, est repérable par l?immense foule qui y grouille. Des centaines de clients s?activent sur place, passant d?un marchand à un autre. Le magasin est facile à démonter, ce sont quelques lits de camp, sur lesquels sont posées une bâche et des tonnes de vêtements d?occasion. Des centaines de mains choisissent, jettent puis reprennent la même marchandise pour enfin se décider. Les voleurs embusqués derrière leur anonymat, cherchent des yeux leur prochaine proie. Les vendeurs, avec leurs petits bonnets argentés, encouragent les clients par des sourires et des paroles rassurantes. À côté, le marché de légumes et de fruits, a aussi son lot de clients, tournant en vase clos. Celui-là goûte des yeux, des fruits inaccessibles, celle-là, caresse des mains les bananes et se décide enfin à acheter. Se déplacer sur ces lieux est un exercice périlleux : les peaux de bananes, les restes de fruits, envoient les imprudents au tapis, sous le regard amusé des vendeurs. De l?autre côté de la ville, depuis la petite placette, les gens semblent enfermés sur eux-mêmes, chacun plongé dans ses pensées. Mais le patrimoine des Harrachis reste leur oued, auquel, ils sont attachés. L?oued El-Harrach est comme une cicatrice inguérissable, lourd héritage d?un passé lointain, que nourrissent des légendes, encore vivantes dans la mémoire collective.