Résumé de la 20e partie n Abriza poursuit son récit du conflit opposant son père au roi Aphridonios. La princesse Abriza continua son récit à Scharkân : «Au reçu de la lettre de mon père, le roi Aphridonios entra dans une fureur inexprimable ; il se leva, et s'assit et s'agita, et écuma, et dit : ?Est-il possible que ma fille, celle dont tous les rois chrétiens se disputent l'alliance et la main, soit devenue une esclave d'entre les esclaves d'un musulman, et qu'elle ait été ployée à ses désirs, et qu'elle ait servi à sa couche, sans contrat légal ! Mais, par le messie ! Je tirerai de ce musulman, une vengeance dont parleront longtemps l'Orient et l'Occident !? «Et c'est alors que le roi Aphridonios, ô Scharkân, songea à envoyer des ambassadeurs à ton père, avec de riches présents, et à lui faire croire qu'il était en guerre avec nous, et à lui demander son secours. Mais, en réalité, c'était seulement pour te faire tomber toi-même, ô Scharkân, et tes dix mille cavaliers, dans un guet-apens par quoi serait satisfaite sa vengeance préméditée. «Maintenant, pour ce qui est des trois merveilleuses gemmes auxquelles tant de vertus sont attachées, elles existent. Elles étaient la propriété de Safîa, et tombèrent entre les mains des pirates et ensuite entre les mains de mon père, qui m'en a fait cadeau. Et c'est moi qui les ai ; et je te les montrerai. Mais pour le moment il te faut, avant tout, retourner près de tes cavaliers et reprendre avec eux le chemin de Bagdad, plutôt que de tomber dans les filets du roi de Constantinia et avant que toutes les communications ne soient, pour vous autres, coupées !» Lorsque Scharkân eut entendu ces paroles, il prit la main d'Abriza et la porta à ses lèvres, et dit : «Louange à Allah dans ses créatures ! Il t'a mise sur ma route pour que tu sois la cause de mon salut et du salut de mes compagnons. Mais, ô délicieuse et secourable reine, je ne puis plus me séparer de toi, et, surtout après tout ce qui s'est passé, je ne souffrirai point que tu restes toute seule ici, car je ne sais point ce qui peut t'arriver. Viens, Abriza, allons à Bagdad !» Mais Abriza, qui avait eu le temps de réfléchir, lui dit : «O Scharkân, hâte-toi de partir le premier et de te saisir des envoyés du roi Aphridonios qui sont au milieu de tes tentes, et tu les obligeras à t'avouer la vérité ; et, de la sorte, tu contrôleras mes paroles. Et moi, avant que trois jours ne se soient écoulés, je te rejoindrai, et ensemble nous entrerons dans Bagdad.» Puis elle se leva et s'approcha de lui, et prit sa tête dans ses mains et l'embrassa ; et Scharkân également. Et elle pleura des larmes abondantes, et des pleurs à faire fondre les pierres. Et Scharkân, en voyant ces yeux qui pleuraient, fut encore plus attendri et endolori, et pleura aussi beaucoup et récita ces deux strophes : «Je lui fis mes adieux, et ma main droite séchait mes larmes et ma main gauche entourait son cou. Elle me dit, peureuse : ?Oh ! ne crains-tu pas de me compromettre aux yeux des femmes de ma tribu ?? Je lui dis : ?Que non ! car le jour des adieux n'est-il pas par lui-même la trahison des amoureux ??» Et Scharkân quitta Abriza et sortit du monastère et remonta sur son coursier que deux jeunes filles tenaient par la bride, et s'en alla. Il passa le pont aux chaînes d'acier et s'engagea parmi les arbres de la forêt et finit par arriver à la clairière située au milieu de la forêt. Et à peine y était-il parvenu qu'il vit trois cavaliers en face de lui, arrêtés brusquement dans leur galop. Et il tira sa flamboyante épée et s'en couvrit, prêt au choc. Mais soudain il les reconnut et ils le reconnurent, car les trois cavaliers étaient le vizir Dandân et les deux principaux émirs de sa suite. (à suivre...)