Spectacle n Fares Fettane et Samah Smida de la coopérative Wach ont interprété, jeudi, au Théâtre national, leur création : «La fin? ce n?est que le commencement». Alors que la fin semble imminente, que toute chose rejoint le néant, que l?espace se vide de son contenu matériel et est rompu de sa temporalité, une nouvelle ère pointe. Alors que tout semble disparaître à jamais, une existence nouvelle jaillit du vide, de rien, dans ce lieu nu où pèse un silence souverain, manifeste, un silence annonçant l?accomplissement de l?action, l?arrivée de deux êtres, deux entités humaines, un garçon et une fille, deux corps qui, dans ce silence expressif, investissent progressivement l?espace, le marquent de leur personne tout attentive au soupir qu?engendre ce lieu où ils se trouvent, ils le définissent et lui inculquent leur empreinte corporelle. D?abord, des gestes lents se profilent, se dessinent dans l?espace scénique, des gestes qui s?accomplissent dans des mouvements symétriques, assurant l?harmonie de l?espace, révélant la complicité des deux corps qui se suivent dans une succession de signes, justement élaborés, mais parfois un décalage rompt cet équilibre régissant l?exercice corporel de l?un comme de l?autre. Le silence continue à faire de l?effet. Seul le soupir du corps, le souffle du geste, le chuchotement des pas, le déplacement feutré du mouvement ponctuent l?espace, lieu de l?expressivité physique, jalonnant ce calme si soutenu. Mais ce silence ne dure pas. Dans le second tableau de la pièce chorégraphique, les deux corps, deux entités physiques anonymes, n?ayant de repère que leur propre corps, réapparaissent sur scène, cette fois-ci en coordonnant leur déplacement avec un autre langage, celui de la musique. Ainsi, celle-ci vient ponctuer leur langage corporel, lui conférer plus de matérialité, lui accorder un sens émotif, un contenu dramatique. Le geste devient alors plus significatif, plus perceptible. Il devient attractif, attirant ainsi l?attention du regard, et agissant manifestement sur la sensibilité de chacun. Plus tard, la musique cesse d?agir, elle cède le pas au silence. C?est dans ces situations alternées, tantôt une action muette, mais démonstrative, tantôt une manifestation sonore, musicale, s?employant à intensifier le geste, que s?écrit la chorégraphie. Une chorégraphie qui n?est pas censée dire une histoire, raconter l?homme, décrire une situation, mais tout simplement énoncer le corps dans sa beauté, le faire parler, lui donner cette liberté de s?exprimer. Car l?essentiel de la pièce, c?est bien l?élément physique, ce corps qui engendre des gestes, construit des mouvements, qui bouge, çà et là, allant d?un lieu à un autre, gérant l?espace à son gré, et créant ainsi des tableaux divers, dont l?agencement des figures se veut d?une esthétique mêlant dans un imaginaire relevant de l?onirisme, la théâtralité à la poésie. Une belle expression de genre !