Course poursuite n La nuit commence à tomber. C?est le moment que choisissent en général les contrebandiers pour faire passer le gasoil et l?essence à dos d?âne au Maroc. Les trois véhicules de la gendarmerie roulent lentement sur une route secondaire de la commune de Maghnia que les contrebandiers ont l?habitude d?emprunter. Parfois, les chauffeurs roulent tous feux éteints. «C?est pour éviter que les contrebandiers nous repèrent», explique un gendarme. Au détour d?un virage, les éléments de la gendarmerie distinguent de loin des silhouettes qu?ils reconnaissent : ce sont celles des baudets qu?utilisent généralement les contrebandiers pour acheminer le gasoil et l?essence au Maroc. «Accélère, fais vite», demande le commandant de compagnie à son subordonné au volant de la Toyota. Celui-ci obtempère et en deux temps trois mouvements, il réussit à s?approcher jusqu?à quelques mètres seulement des baudets. «Descendez vite et rattrapez-les», ordonne encore le chef. Les gendarmes se mettent tous alors à la poursuite de deux? jeunes qu?ils venaient de repérer. Ce sont les propriétaires des cinq ânes qui se dirigeaient vers la frontière. La nuit aidant, les deux contrebandiers parviennent à s?évaporer dans la nature, abandonnant et leurs ânes et leurs jerricans de gasoil. Sur ordre de leur chef, les gendarmes se mettent à «décharger» la marchandise qui était destinée au marché marocain. Sur le dos de chaque baudet, pas moins de? 7 jerricans de 30 litres chacun. «Pauvres baudets ! Regardez celui-là, il a mal au pied en raison de la charge qui lui a été imposée», commente un gendarme. Après quelque dix minutes d?efforts, les jerricans sont prêts à être saisis. Mais comment faire pour les transporter jusqu?à la brigade de Maghnia, distante d?une dizaine de kilomètres ? Les trois Toyota de la gendarmerie ne peuvent en transporter qu?une dizaine. Qu?à cela ne tienne, le commandant de compagnie insiste auprès de ses éléments pour «caser» tous les jerricans dans? deux Toyota. On ne sait par quel système D l?idée du chef se concrétise et les deux Toyota prennent la direction de Maghnia pour y déposer leur prise. Les gendarmes manquent de moyens, mais ils ne s?en plaignent pas pour autant. «Nous sommes là pour travailler et non pour nous plaindre ou nous lamenter sur notre sort », dit l?un d?eux.