Conversation n Qu?est-ce qu?écrire, pour une femme, et pourquoi ? Écrit-elle contre l?oubli ? Serait-ce par besoin ou par désir, voire par goût ? Nadia Sebkhi et Nassima Touizi ont chacune abordé leur rapport à l?écriture. «Pour moi, l?écriture est un soulagement. J?ai appris à dire en écrivant», explique Nassima Touizi, auteur de Une lettre à Kahina. Etant timide, elle recourt à l?écriture pour s?extérioriser, exorciser ses craintes et sa réserve et y trouver en conséquence un lieu d?expression qui lui sied. Elle s?y exprime d?ailleurs en toute liberté. Pour sa part, Nadia Sebkhi, auteur du roman Un Amour silencieux et du recueil de poèmes Sous le voile de mon âme, précise que «l?écriture est un constat, une errance (dans les mots). J?aime aller dans la beauté, la sensualité et l?intimité des mots». Et d?ajouter : «En écrivant, je défie l?écriture, je joue avec les mots avec lesquels on peut tout dire sans retenue ni pudeur ni interdit.» En outre, l?écriture, pour elle, est un besoin. «C?est parce que la parole nous est confisquée que nous écrivons», dit-elle. «Tant que la culture reste patriarcale, l?écriture au féminin s?impose», ajoute-t-elle. Toutefois, elles refusent d?adhérer à l?écriture féministe qui est, pour elles, un cliché, un fait réducteur de l?écriture féminine. En effet, concernant le qualificatif «écriture au féminin», toutes deux déclarent qu?il n?y a aucune différence ni la moindre limite entre une écriture féminine et une littérature produite par un homme. «C?est une même écriture, sauf que la sensibilité diffère», soulignent-elles. Et d?ajouter : «L?écriture est une création, un fait qui n?a ni frontière ni sexe. On écrit pour tout le monde.» Nadia Sebkhi dit : «Avec les hommes, l?écriture m?accueille, tandis qu?avec les femmes, je me mêle à elles. L?écriture de l?une complète l?écriture de l?autre. Il y a une complémentarité entre les deux, et les deux se confondent pour constituer un tout.» C?est pour cette raison qu?elles appellent à la création d?un espace favorable à l?épanouissement de l?écriture féminine. «Il faut encourager l?écriture féminine parce qu?elle renforce la société, l?enrichit, la complète.» Les deux intervenantes tiennent, en revanche, à préciser la différenciation entre l?écriture au féminin ? qui est une écriture pour dire la femme, raconter sa sensibilité, faire entendre sa voix ? de l?écriture féministe qui, elle, est une écriture revendicative, une écriture qui milite pour les droits de la femme. «L?écriture féministe est une autre problématique, c?est un débat qui se situe à un autre niveau. Il ne faut surtout pas confondre les deux, puisque l?une se dégage de l?autre», précisent-elles.