Un jour que la princesse était dans sa chambre occupée à broder, il prit les clés suspendues dans la grande salle et s'en alla vers la chambre interdite. Il chercha longtemps la bonne clé et finalement la lourde porte s'ouvrit. A l'intérieur, il n'y avait rien si ce n'est un corbeau noir fixé au mur par trois clous en or. L'un lui traversait le cou et les deux autres retenaient ses ailes. ? Ah ! Enfin te voilà ! Heureusement que tu t'es décidé à venir ! Je suis presque mort de soif ! Donne-moi un peu d'eau de la cruche posée sur la table sans quoi je périrai ! Le jeune homme réfléchit, mais son bon c?ur se laissa attendrir. Il pensa qu'en pareille situation, il serait heureux qu'on lui donne un peu d'eau. Il versa une goutte d'eau dans le bec du corbeau. A peine avait-elle touché la langue de l'oiseau que le clou qui tenait son cou roula sur le sol. ? Qu'est-ce que cela ? demanda le garçon. ? Ce n'est rien répondit l'animal. Donne-m?en encore une goutte. Ne me laisse pas mourir. ? Si tu le veux, dit le garçon qui versa une seconde goutte d'eau sur la langue de l'oiseau. ? Cette fois, c'est le clou qui tenait l'aile droite qui roula sur le sol. ? C'en est assez ! dit le garçon. ? Je t'en supplie. Sois bon avec moi ! Une seule goutte. Donne-m?en une seule et puis je te laisserai tranquille. Lorsque le garçon la lui eut donnée, le troisième clou se détacha aussitôt. L'oiseau, libéré de ses liens, étendit les ailes et s'envola par la fenêtre en croassant. Le garçon, fort effrayé, courut rapidement hors de la chambre dont il referma à clé la lourde porte. Pourvu que la princesse ne s'en aperçoive pas, se dit-il tout bas. Hélas ! la princesse s'en était aperçue. Au moment où il pénétra dans la salle où elle se trouvait, elle se piqua le doigt et, pâle et tremblante, elle le regarda entrer. ? Tu es allé dans la salle interdite, lui dit-elle. L'enchanteur qui m'a ensorcelée va bientôt arriver pour m'enlever et tu me retrouveras difficilement. Elle se mit à pleurer et le garçon ne parvint pas à la consoler même lorsqu'il lui promit qu?il la retrouverait où qu'elle soit de par le monde. Le lendemain à son réveil, la princesse avait disparu. Il resta durant trois jours et trois nuits à I'attendre, mais, las d'attendre, il se remit en route. Il grimpa et grimpa encore le long du tronc de l'arbre. Il avançait toujours plus haut dans les branchages jusqu'à ce qu'il soit parvenu à une forêt si dense et si sombre qu'aucun rayon de lumière ne réussissait à y pénétrer. Il cherchait sa princesse sans découvrir aucune trace de son passage. Au bout du troisième jour, il aperçut enfin une clarté dans l'obscurité. Il la suivit et ce n'est que trois jours plus tard qu'il parvint dans une clairière où il trouva une petite cabane de chasse. Il y entra et découvrit sa princesse étendue sur un lit. ? Comment as-tu pu me retrouver ? s'étonna-t-elle. ? Ne t'avais-je pas promis de te retrouver où que tu sois dans le monde ? Mais ne perdons pas de temps. Il faut fuir avant que l'enchanteur ne revienne te chercher. Ils coururent à travers la forêt sans se retourner jusqu'à ce que la princesse, épuisée, demande grâce. Ils s'assirent au pied d'un grand chêne et la princesse posa sa tête sur les genoux de son compagnon et s'endormit. Il la contemplait, tout à son bonheur de l'avoir retrouvée, lorsqu'il remarqua un petit sac en jute attaché à son cou. Il l'ouvrit et y découvrit une pierre merveilleuse tant par sa couleur que par sa forme. Il s'amusait à laisser des rayons de lumière la traverser, il s'émerveillait de ses reflets et la posa finalement dans l'herbe. Lorsqu'il voulut la reprendre, un corbeau l'avait saisie et voletait de branches en branches. C'est encore un coup de l'enchanteur, pensa le jeune homme effrayé. (à suivre...)