Résumé de la 104e partie n L'histoire de la vieille vipère était tellement convaincante ! Mère-des-Calamités se propose donc d'être le guide de l'expédition. Elle les mènera à bon port… Lorsque les deux frères eurent entendu cette histoire, ils furent joyeux extrêmement en songeant à toutes les acquisitions qu'ils allaient faire et surtout à la jeune Tamacil, que la vieille disait fort experte, malgré sa jeunesse, dans l'art des plaisirs. Mais le vizir Dandân n'avait écouté cette histoire qu'avec un grand sentiment de méfiance et s'il ne s'était pas levé et en allé, c'était seulement par respect pour les deux rois ; car les paroles de cet ascète étrange ne lui entraient guère dans la tête et étaient loin de le convaincre ou de le satisfaire. Pourtant, il cacha son impression et ne voulut rien dire, de peur de se tromper. Quant à Daoul'makân, il voulait d'abord marcher sur le monastère à la tête de toute son armée ; mais la vieille Mère-des-Calamités l'en dissuada en lui disant : «J'ai peur que le chef des moines, Dechianos, à la vue de tous ces guerriers, ne prenne peur et ne s'échappe du monastère en emmenant la jeune fille.» Alors Daoul'makân fit appeler le grand chambellan et l'émir Rustem et l'émir Bahramân et leur dit : «Demain, à la pointe du jour, vous marcherez sur Constantinia, où nous ne tarderons pas nous-mêmes à vous rejoindre. Toi, ô grand chambellan, tu prendras le commandement général de l'armée à ma place ; et toi, Rustem, tu remplaceras mon frère Scharkân ; et toi, Bahramân, tu remplaceras le grand vizir Dandân. Et surtout prenez bien garde de faire connaître à l'armée que nous sommes absents. D'ailleurs notre absence ne sera que de trois jours.» Puis Daoul'makân, Scharkân et le vizir Dandân choisirent cent guerriers d'entre les plus valeureux et cent mulets chargés de caisses vides destinées à contenir les trésors du monastère et ils emmenèrent aussi la vieille Mère-des-Calamités, cette perfide, qu'ils croyaient toujours un ascète aimé d'Allah, et suivant son indication, ils prirent le chemin du monastère. Quant au grand chambellan et aux troupes musulmanes... A ce moment de sa narration, Schahrazade vit apparaître le matin et s'arrêta discrètement dans son récit. Le soir venu, elle dit : Quant au grand chambellan et aux troupes musulmanes, suivant l'ordre du roi Daoul'makân, le lendemain, à l'aube, ils plièrent les tentes et firent route sur Constantinia. De son côté, la vieille Mère-des-Calamités ne perdit point de temps. A peine furent-ils tous hors des tentes, qu'elle tira de l'une des caisses qu'elle avait sur son mulet deux pigeons apprivoisés par elle ; et elle attacha au cou de chacun de ces pigeons une lettre adressée au roi Aphridonios de Constantinia, dans laquelle elle le mettait au courant de tout ce qu'elle venait de faire et elle terminait en disant : «Aussi ô roi, il faut tout de suite envoyer au monastère dix mille guerriers des plus éprouvés parmi les plus vaillants d'entre les Roum. Et, lorsqu'ils seront arrivés au bas de la montagne, qu'ils ne bougent pas avant mon arrivée ! Et alors je leur livrerai les deux rois et le vizir et les cent guerriers musulmans. «Pourtant je dois te dire, ô roi, que ma ruse ne peut s'accomplir sans la mort du gardien du monastère, le moine Matrouna ; je le sacrifierai donc pour le bien commun des armées chrétiennes, car la vie d'un moine n'est rien devant le salut de la chrétienté. «Et loué soit le Christ, notre Seigneur, au commencement et à la fin !» (à suivre...)