Comportement n Aujourd'hui certains jeunes, qui ne s'entendent pas avec leurs parents, menacent de faire comme le Hamid de l'histoire. Même si l'histoire de Hamid s'est déroulée il y a maintenant près d'un demi-siècle et que les principaux protagonistes du conflit sont tous décédés, on se rappelle, dans ce village de l'Atlas blidéen que nous appellerons N., l'histoire de l'homme qui a juré de ne revenir au pays natal qu'après la mort de sa mère ! Si ce serment a pu paraître, en son temps, scandaleux pour certains, parce que dans la tradition algérienne on respecte ses parents et on les honore, il a été parfaitement approuvé par d'autres. Aujourd'hui, certains jeunes, qui ne s'entendent pas avec leurs parents, menacent de faire comme ce Hamid. Mais il convient, avant que le lecteur ne donne son opinion sur cette affaire, qu'il lise d'abord l'histoire de ce Hamid (il s'agit, bien sûr, d'un pseudonyme pour respecter l'anonymat des personnages et des lieux). Il faut commencer par dire que la mère de Hamid, que nous appellerons Fatima, était une femme de caractère : volontaire, travailleuse, courageuse, comme toutes les femmes de nos campagnes, mais aussi une femme de mauvais caractère : autoritaire, elle ne souffrait pas qu'on la contredise ni qu'on conteste ses décisions. Elle s'emportait facilement et n'hésitait pas à dire aux gens leurs quatre vérités. Son mari, Ali, la rappelait à l'ordre, mais, lui aussi, elle le prenait à partie, le remettant parfois publiquement à sa place : «Toi, occupe-toi de tes affaires !» Ou alors : «Au lieu de me défendre, tu te dresses contre moi !» Quant à ses cinq enfants, deux filles et trois garçons, après les avoir souvent battus dans leur enfance, elle les mène à la baguette, leur montrant comment parler, comment se tenir et surtout comment exécuter tous ses ordres. Au village, on l'appelait «Aïcha radjel», Aïcha l'hommasse, mais personne n'osait le lui dire en face tellement on la craignait. C'est elle qui a choisi les épouses de ses deux premiers fils et elle s'apprêtait à le faire le plus naturellement du monde pour le cadet, Hamid. Mais voilà, Hamid n'apprécie pas la fille qu'elle lui propose. «Et pourquoi elle ne te plaît pas ? demande Fatima en colère. — Ce n'est pas mon genre !», répond Hamid sur le même ton. Fatima recule, surprise, Hamid, lui, n'a pas du tout envie de reculer. En fait, voilà longtemps qu'il veut secouer le joug maternel et s'imposer. «Et quel est donc ton genre ? continue Fatima. — Je te le dirai plus tard.» Elle ne dit rien devant lui, comme si cet échange lui avait rabattu son caquet, mais dès que Hamid est parti, elle éclate : «Il me paiera son insolence et je jure que je ferai partir toute fille qu'il épousera, même si elle est la plus parfaite des femmes !» Un serment qui fait frémir ses filles et ses belles-filles. Un serment que Hamid n'apprendra que plusieurs années plus tard... (à suivre...)