Rencontre n Arezki Mellal était l'invité, hier, de «Un auteur, un livre», un rendez-vous littéraire bimensuel initié par le Centre culturel français d'Alger. Maintenant, ils peuvent venir, paru aux éditions Barzakh, a fait l'objet d'un débat. «L'écriture du roman s'est faite en rapport au réel, à ce qui se passait dans le pays», a dit Arezki Mellal, l'auteur du livre. Le roman plonge le lecteur dans la tragédie qu'a vécue l'Algérie durant la décennie noire (1990). Il met en scène un homme fragilisé par tant de souffrances et par tant de dangers. C'est un texte fort et chargé d'émotion. «J'ai écrit ce roman parce qu'il fallait l'écrire. Il fallait écrire contre la mort [et aussi contre l'oubli]. Je l'ai écrit pour dire la réalité, mais par la fiction», a-t-il expliqué, précisant en outre que «ce roman n'est pas un texte sanguinaire, macabre». De son côté, Rachid Mokhtari, critique, a souligné que «le livre a inauguré l'écriture de l'urgence». Quant à Mohamed Larbi, écrivain, il a affirmé que «c'est un livre événement», précisant qu'il y a «de la douleur à chaque page», que «le personnage est en butte à toutes les violences que la société algérienne a connues». Evitant de revenir sur la tragédie, un volet de l'histoire de l'Algérie qui, selon lui, incombe désormais aux historiens, Mohamed Badaoui, écrivain, a déclaré que «le livre s'inscrit dans un projet d'écriture». Il y a, en effet, «une volonté de témoigner, une référence de la réalité dans l'écriture romanesque, et de l'envelopper – cette réalité – dans un travail sur l'écriture et l'imaginaire», a souligné Rachid Mokhtari. Par ailleurs, tout le monde s'accorde à dire que le roman est «un texte d'intériorité», que dans cet espace romanesque se construit une psychologie. Puisque, outre ce qui est dit à un niveau manifeste, il y a ce qui s'exprime d'une manière latente. Deux situations narratives venant se superposer pour former le récit. Le texte est ainsi doublement structuré. Ce qui lui confère sa teneur et sa symbolique. Outre les souffrances liées au drame qu'a vécu l'Algérie, le «je»-narrateur, le personnage principal du roman, endure des souffrances amoureuses de type œdipien. Il y a un rapport incestueux qui régit l'écriture d'intériorité. Le «je»-narrateur raconte une mère autoritaire, possessive qui refuse de partager son fils avec quiconque, sauf avec sa bru, Yasmina, qu'elle lui a choisie, imposée seulement pour se projeter en elle et se rapprocher davantage de son fils. Ainsi, Yasmina perpétue l'image, la présence de la mère sur laquelle le fils porte implicitement des désirs libidinaux ; c'est par l'entremise de la bru que les relations œdipiennes se manifestent. L'inceste est donc consommé. Le fils a d'ailleurs pris conscience de son acte incestueux, d'où l'aversion affichée à l'égard de sa femme, donc de sa mère. Cette relation mère-fils se traduit par un jeu, celui de l'amour et de la haine. Le «je»-narrateur vit un conflit parce qu'il est partagé entre deux sentiments paradoxaux. Tantôt il veut se séparer de Yasmina et, donc, divorcer d'avec sa mère, tantôt il récupère sa femme et, donc, se réconcilie avec la mère. Ainsi, Maintenant, ils peuvent venir est une écriture du subconscient.