Découverte C?est un vieux château du Moyen-Age habité par un Anglais, duc et seizième du nom, prénommé, Sir Marmaduke. C?est une personnalité du Sussex, qui déteste être dérangé à l?heure du thé. Or, ce 14 août 1948, son valet de chambre affolé le dérange de la manière a plus inconvenante qui soit : «? Sir, il y a là un jardinier... ?Que veut-il, Ronald ? Et où sont mes toasts ? Quelle est cette agitation ? ?Sir, le jardinier dit qu?il a découvert un cadavre dans le parc...» Si Marmaduke est d?une humeur épouvantable ce matin-là, et, contrairement au cliché habituel, il est dépourvu du célèbre flegme britannique. «? Un cadavre ! Seigneur, Ronald, j?ai horreur des cadavres ! Débarrassez-vous de ce jardinier. ?Mais Sir, il insiste. Il veut que nous prévenions la police. ?Qui est ce cadavre, Ronald ? ?Je l?ignore, Sir. Le jardinier affirme que c?est celui d?une femme. ?Eh bien, allez voir, Ronald, et tenez moi au courant. J?appelle Scotland Yard.» Sir Marmaduke dispose de l?unique téléphone à vingt kilomètres à la ronde. Il se résigne à signaler l?affreuse découverte, et se résigne également à entendre le jardinier. Stilwell est jardinier, mais aussi peintre, man?uvre, homme à tout faire. Et, pour l?heure, il est assez secoué par sa découverte : «? Je l?ai vu dans le parc, près d?un buisson, Sir. Je passais par là pour rentrer chez moi, le chemin est plus court. ?Vous pourriez utiliser le chemin communal. Cette propriété est privée, je vous rappelle. ?Je sais, mais j?étais fatigué, Sir. ?Vous dites qu?il s?agit d?une femme ? ? Oui, Sir, une femme. C?est... une femme... ?Et bien, qu?y a-t-il d?extraordinaire ? Vous avez l?air troublé. ?C?est que? Elle est nue, Sir ! ?Il n?en est pas question. Allez à l?office, et attendez. Ronald, assurez-vous que personne n?approche de cette femme, et attendez la police !» Sir Marmaduke est vert. La simple idée d?un cadavre à quelques mètres de lui peut-elle le rendre vert à ce point ? Le jardinier, lui, est tout pâle, ses mains tremblent. Et Ronald, vieux serviteur habitué à observer ses maîtres autant que les autres domestiques, trouve curieuse l?attitude des deux hommes. Son maître est exagérément atteint par la nouvelle. Exagérément, c?est bien le mot. Quant au jardinier, il a l?air de jouer un rôle. Tout cela est bien bizarre. En attendant la police, Ronald se rend donc auprès du massif, à l?ouest du parc. Et là, dans un creux de gazon, dissimulée par les arbres, à l?abri des regards, il découvre la femme. (à suivre...)