Résumé de la 4e partie n Lucy souffre du comportement de son mari, qui l'accapare et lui interdit de parler à qui que ce soit. Elle s'en ouvre à son frère Edouard, qui tente de raisonner Henry Foster. Edouard cède. Il le faut bien, mais il est encore plus inquiet de la violence et l'agressivité dont Henry fait preuve. Lucy se fait l'interprète de leur conversation. Prudemment, il procède par étapes. «Henry, tu as de plus en plus de migraines... et elles sont de plus en plus douloureuses... J'ai l'impression que ces crises sont provoquées par un travail intellectuel trop intense. — C'est une impression ou une certitude ? — Une certitude. Tu as repris tes recherches trop tôt, et un travail comme le tien, huit ou dix heures par jour, c'est trop... — Qu'est-ce que je dois faire, selon toi ? — Je te conseille de renoncer à tes recherches. — A ce point ? — Ta raison est en danger, Henry. — Il n'en est pas question. — Alors... va voir un neuropsychiatre... — J'en ai vu douze à l'hôpital… — Un psychiatre, ou un psychanalyste... — Nous y voilà... C'est dans ma tête que ça se passe... C'est moi qui ne veux plus entendre ? C'est ça ? Tu me prends pour un imbécile ? Tu crois que s'il y avait la moindre chance que ce soit ça, je ne l'admettrais pas. Tu n'es pas dans ma tête, Edouard. Ce n'est pas toi qui perçois la rumeur du monde comme si tu étais au fond de l'océan, à des kilomètres au fond de l'océan... et à travers ces kilomètres liquides, infranchissables, la voix de Lucy passe. Assourdie, douce, mais elle passe... Une fréquence, comme celle des dauphins entre eux, tu vois ? Une fréquence unique. Un jour on comprendra, on saura... on expliquera. Tout s'explique un jour ou l'autre, et l'homme découvre alors ce qui existait déjà et qu'il ne comprenait pas, tout simplement. Je n'irai pas perdre mon temps chez un psychiatre. Nous ne parlerions pas de la même chose.» La décision d'Henry Foster est irrévocable. Mais la surdité s'aggrave, et les migraines sont plus nombreuses, au point qu'il est tout de même obligé d'accepter le repos. Plus de laboratoire. Fermé à clé, le laboratoire. Henry Foster entre dans une période d'oisiveté forcée, et Lucy également. Il ne vivait que pour ses recherches et pour Lucy. Lucy ne vivait que pour lui et son travail. Désormais ils sont face à face, oisifs et cette oisiveté rend Henry encore plus tyrannique. Lucy a quarante-cinq ans. Elle est pleine de vie et de force. Elle a toujours été active. Ce face-à-face improductif avec son mari la rend dépressive. Edouard se rend compte alors que le remède est pire que le mal. Que sa sœur en souffre inutilement, puisqu'elle ne peut rien pour Henry, rien d'autre que d'écouter à sa place, et il n'écoute presque plus rien. «Travaille, Lucy, fais quelque chose, n'importe quoi... — Mais quoi ? Je n'ai jamais travaillé qu'avec lui… — Alors travaille avec moi. Il te faut une occupation, puisque tu ne peux plus avoir de vie normale. Je fais des travaux en ce moment, tu pourrais m'aider... — A quel titre ? — Ma secrétaire. Je sais que cela t'intéresserait. Et il te faut absolument un dérivatif. Henry te mange, il te ronge, il t'étouffe. — Il ne voudra jamais. (à suivre...)