Catastrophe Soudain, les marins sentent leurs pieds s?enfoncer légèrement dans l?eau. Un terrible dilemme se pose au Raïs : «Dois-je continuer jusqu?à notre lieu de pêche, ou faut-il retourner? Nous n?allons pas ramasser grand-chose avec cette houle?» Et soudain, il crie à ses marins : «Je vais faire demi-tour, il vaut mieux rentrer? Je ne pense pas que le vent tombera !» Sur les ponts, les filets lestés de petites boules de plomb sont prêts depuis longtemps. Les jeunes gens se regardent, médusés. Jamais encore Raïs n?avait fait demi-tour sans poser les filets? Mais, comme à leur habitude, ils ne discutent jamais ses décisions. Et c?est au moment où il engage le virage que la catastrophe survient. Soudain, les marins de «L?Intrépide» sentent leurs pieds s?enfoncer légèrement dans l?eau, le fond est en train de céder. «Raïs, nous coulons !» «Agrippez-vous aux côtés !» Raïs, d?un bond, lâche le gouvernail et se jette sur la radio installée sur une petite table. Il lance un SOS vers la côte, recommence fébrilement à plusieurs reprises, mais il ne reçoit aucune réponse de la terre. Les garçons hurlent : «Raïs, Raïs, qu?allons-nous faire ? Nous coulons !» Peu à peu, l?eau monte et, brusquement, le fond cède et les marins s?agrippent désespérément, mais ils sont projetés par la force de la cabine qui bascule, s?enfonçant dans l?eau dans un grand fracas de bois brisé. Raïs remonte à la surface, s?essuie les yeux, et sa seule pensée est pour «ses garçons». «Tewfik, Lyès, Salah, venez !» crie-t-il. Il nage vers un grand morceau de bois qui flotte à la surface? tout ce qui reste de «L?Intrépide». Des autres, il n?aperçoit que des têtes qui montent et descendent au gré des vagues, des bras qui se dressent et disparaissent aussitôt. Raïs, tenant solidement d?une main l?épave flottante, fait des signes de l?autre aux naufragés qui, bons nageurs, parviennent à le rejoindre et à saisir le grand carré de bois qui tangue avec la houle? «Ecoutez ! hurle-t-il pour couvrir le bruit assourdissant des vagues, n?ayez pas peur ! J?ai lancé des appels et donné notre position, on va venir nous chercher ! Tout ce qu?il faut, c?est tenir?» Mais au fond de lui-même, il doute fort que quelqu?un ait perçu ses appels au secours. (à suivre...)