Rencontre n L'écrivain et le nobeliste (en 1999) allemand, Günter Grass, a fait, hier, l'objet d'un débat à la bibliothèque nationale dans le cadre d'un café littéraire. «Parler de Günter Grass, c'est parler d'une œuvre, d'une littérature et aussi d'un prix Nobel», a souligné Amine Zaoui, directeur de la Bibliothèque nationale. Et de préciser : «On a choisi cette figure littéraire universelle à plus d'un titre : d'abord parce qu'il est le second écrivain européen, après Kafka, à être lu dans le monde arabe ; ensuite parce qu'il est un ami des sociétés arabes. Son pays est le Yémen où il est considéré par les observateurs comme étant le défenseur de la liberté d'expression. Il s'est rangé d'ailleurs auprès des écrivains d'opposition. Enfin, parce qu'il a amorcé à travers ses idées et ses prises de positions un dialogue interculturel et donc intercivilisationnel.» Le directeur de la bibliothèque a ajouté que «parler de Günter Grass, c'est s'approcher de l'auteur, de sa pensée, de son œuvre», et c'est également «une invitation à le connaître et à le lire». Mme Rafika Belghou, universitaire et spécialiste de la littérature allemande, a, pour sa part, évoqué sa vie et retracé son parcours littéraire : «Günter Grass, qui est une personnalité de débat et de réflexion, est un personnage très lié à l'histoire, notamment celle de son pays ». Ensuite, la conférencière a décrit Günter Grass comme un personnage à l'esprit novateur, en quête continuelle de ce qui pourrait donner à la littérature un caractère nouveau. «Günter Grass est un écrivain d'après-guerre, il s'inscrit dans une littérature considérée comme étant un point de départ», a-t-elle dit. Selon elle, l'écrivain a restitué une certaine forme de continuité, il a renoué avec une tradition antérieure à 1939 pour trouver ce qui pourrait donner à cette littérature d'après-guerre de nouveau et de caractéristique. «Günter Grass a apporté un souffle nouveau à la littérature allemande», a-t-elle dit, ajoutant que «le discours de l'écrivain se révèle d'un verbe très spécial qui a ouvert des perspectives thématiques et a orienté la littérature allemande sur de nouveaux sentiers. Il a par ailleurs, et contrairement à ses contemporains, porté un très fort regard sur le passé». Concernant son aveu en août 2006 sur son enrôlement, à l'âge de 17 ans, dans les rangs de la SS, elle s'est interrogée : «S'est-il senti interpellé par les évènements politiques ?», ou «Peut-être que Günter a vécu avec cela en solitaire ?». Selon la conférencière, cette divulgation tardive, faite quelques jours avant le lancement de son dernier livre, et qui a suscité malaise et incompréhension en Europe et a été à l'origine d'une controverse entre intellectuels européens, s'est révélée comme une sincérité, et même tardive, elle n'a fait que renforcer sa légitimité. «Günter Grass a fait un travail de mémoire, de conscience», a-t-elle déclaré.