Nacer a préféré envoyer sa petite famille – sa femme et ses trois enfants – à Alep, en Syrie, pour passer le ramadan. «La famille de ma femme a insisté, elle m'a même prié de la laisser passer le mois avec elle, alors j'ai cédé. Mais moi je ne peux pas y aller, j'ai un contrat de travail en Algérie», explique Nacer, qui est en Algérie depuis 2003. Originaire d'Alep, la deuxième grande ville syrienne après la capitale, Damas, Nacer mange, en ce mois sacré, dans la famille de son ami Samih, qui habite à Ouled Fayet et travaille comme sculpteur sur bois. Samih est aussi très nostalgique : «C'est mon cinquième ramadan en Algérie, mais je n'ai jamais oublié le goût et l'ambiance de ce mois sacré dans mon pays.» Pour lui, le ramadan en Syrie, c'est tout à fait autre chose. «La religion et la spiritualité sont très présentes durant ce mois. Dans chaque mosquée on entend les madayeh (chants religieux) récités par des groupes appelés El-Ikhwane (les frères). Les fidèles, après la prière des tarawih, suivent, dans une ambiance sacrée, ces chants religieux en réagissant avec des mouvements rythmés de la tête. Cette scène dure parfois jusqu'à la prière d'el-fadjr», explique Samih, qui regrette l'absence de ces pratiques religieuses en Algérie. «Cela fait partie de la conception de ce mois sacré chez nous. En Algérie, vous ne faites que la prière des tarawih», dit-il. Pour se sentir près de leurs coutumes et traditions, Samih et sa famille ont opté pour une autre technique : ils écoutent des CD et des cassettes de ces madayeh de chez eux. Concernant la culture culinaire des familles syriennes en Algérie, il y a une très grande ressemblance avec la cuisine libanaise. «Nos plats du mois du ramadan ont d'ailleurs les mêmes noms, ils ont aussi la même composition. N'oubliez pas que cette région du monde arabe, le Liban et la Syrie, faisaient partie, avant le colonialisme, de ce qu'on appelait Echam. Notre culture est presque la même», dit Samih. La cuisine syrienne, comme la libanaise, est à base de riz et de viandes blanches. Le poulet, le canard et le pigeon sont les plats préférés des Syriens durant ce mois. Mais la préparation de ces volailles est très différente. Le canard est souvent farci d'oignon, d'ail et de «mistika», une épice très prisée en Orient, qui ressemble aux pépins d'orange.