Résumé de la 4e partie n Le vieillard qui réclame des ravioli n'est autre que l'un des fils Corato. Ses frères sont laveur de carreaux, éboueur, homme de ménage... Pour en avoir le cœur net, tout de même, l'avocat avise un contremaître, dans un bureau vitré, et se présente seul. «Vous connaissez les quatre frères Corato ? — Evidemment, monsieur... — Le garage est vraiment à eux ? — Ils sont propriétaires, monsieur. Pourquoi ? — Mais... c'est Luigi qui s'occupe des poubelles ?» Le visage du contremaître se ferme. «Ça, c'est leurs affaires. Ces gens-là s'organisent comme ils veulent, moi ça ne me regarde pas...» Après un conciliabule avec les quatre frères, maître Galatzeo fait quelques vérifications rapides et se rend à la police de Gênes, le sourire aux lèvres, la mèche gominée et conquérante. Le lendemain, suivi de deux policiers, il frappe à la porte du bureau du commendatore Joseph Corato. «Le commendatore est en rendez-vous, affirme une secrétaire moustachue et sans âge, vous désirez ?» C'est une perquisition. Sur plainte déposée par maître Galatzeo au nom de ses quatre clients Corato. Pietro, Jéronime, Luigi et Fortuné. «Mais le commendatore n'est pas là !» Les policiers n'ont pas besoin de lui. Légalement, les quatre frères sont domiciliés ici, ils ont le droit d'autoriser la perquisition. C'est Jéronime le gourmand qui mène la visite, à travers le dédale cossu de la grande maison bourgeoise. Tentures, couloirs, salons, chambres, tableaux... Bibelots, salle à manger somptueuse, bibliothèque, fumoir... C'est là que vit Joseph, il y a des cuisines, et la cave aussi... Puis Jéronime guide les visiteurs vers le dernier étage, un couloir sombre, un escalier étroit, humide, lugubre : «Nos chambres sont là. Nous avons chacun une chambre, nous mangeons dans notre chambre, quand il nous donne à manger, mais il en donne peu, il dit que notre entretien lui coûte cher.» Quatre chambres de bonne : un lit de fer, une table de bois et deux chaises, une armoire. Les quatre frères Corato partagent le même domaine sous les toits, la même pauvreté. Depuis trente-sept ans, ils travaillent sans toucher le moindre salaire. Joseph, le fils élu, ne restitue jamais à ses frères la moindre part de leurs revenus. Et pourtant ils sont milliardaires. Les locataires des immeubles dont ils sont propriétaires leur octroient souvent des pourboires pour avoir lavé l'escalier, rangé les poubelles, fait les vitres, distribué le courrier. Car ils savent tous que l'aîné ne leur donne rien, alors qu'il porte les frais d'entretien des immeubles sur les quittances de loyer des locataires. On leur donne même des vêtements usagés. Depuis une bonne dizaine d'années, Joseph refuse de recevoir ses frères, de leur parler, et lorsqu'il les croise, il passe au large. Jéronime explique : «Il nous trouve bêtes et sales. Quand il a quelque chose à nous dire, il glisse un billet sous la porte de la chambre.» Ils sont là, les derniers billets du commendatore Joseph Corato, à l'intention de ses frères. A Jéronime : «Tu seras privé de nourriture pendant vingt-quatre heures, tu as volé deux œufs durs à la cuisine...» A Pietro : «Tant que tu n'auras pas signé ce papier, demi-ration de nourriture.» (Le papier est un certificat destiné à l'administration et mentionnant que Pietro est à sa charge.) (à suivre...)