Résumé de la 3e partie n Les deux invités de Schamsennahar sont reçus avec tous les égards… Abalhassan lui dit : «Mon jeune seigneur, que ton âme soit tranquille et qu'elle prête toute son attention à ce concert qui promet d'être admirable, grâce à la belle Schamsennahar qui probablement va bientôt arriver !» En effet, à peine Abalhassan avait-il achevé ces mots que les dix jeunes femmes se levèrent toutes ensemble et, les unes pinçant les cordes et les autres agitant rythmiquement leurs petits tambours à grelots, entonnèrent ce chant annonciateur : «Azur, tu nous regardes soudain avec un sourire content. O lune, voici que tu relèves tes robes de nuages et tu te voiles, confuse ! Et toi, soleil, ô soleil vainqueur, tu fuis et tu ne brilles plus !» Et le chœur s'arrêta, attendant la réponse que chanta l'une des dix : «O mes yeux ! Voici notre Lune qui s'avance. Car le soleil nous visite, un jeune soleil princier, qui vient rendre hommage à Schamsennahar !» Alors le prince Ali, qui figurait ce soleil, regarda du côté opposé et vit, en effet, s'approcher douze jeunes négresses qui portaient sur leurs épaules un trône d'argent massif, recouvert d'un dais de velours où était assise une femme qu'on ne pouvait encore voir, voilée qu'elle était par un grand voile de soie légère qui flottait sur le devant du trône. Et ces négresses avaient un foulard de soie et d'or ajusté à la taille. Et lorsqu'elles furent arrivées au milieu des chanteuses, elles déposèrent doucement le trône d'argent et reculèrent sous les arbres. Alors une main écarta les draperies et des yeux brillèrent sur un visage de lune ; c'était Schamsennahar. Elle était vêtu d'un grand manteau en étoffe légère, bleu sur or, constellé de perles, de diamants et de rubis, non point en quantité prodigieuse, mais en petit nombre seulement ; le tout était d'un choix et d'un prix inestimables. Alors, les draperies écartées, Schamsennahar releva complètement son petit voile et regarda en souriant le prince Ali et inclina la tête légèrement. Et le prince Ali la regarda en soupirant et ils se parlèrent tous deux un langage muet, par lequel, en quelques instants, ils se dirent bien plus de choses qu'ils n'auraient pu se dire en un long espace de temps. Mais Schamsennahar put enfin détacher ses regards des yeux d'Ali ben Bekar, pour ordonner à ses femmes de chanter. Alors l'une d'elles se hâta de mettre son luth d'accord et chanta : «O destinée ! Quand deux amants, l'un vers l'autre attirés, se trouvent aimables et s'unissent dans un baiser, à qui la faute, sinon à toi ? «O mon cœur, dit l'amante, par ma vie ! donne encore un baiser ! Je te le rendrai, tel qu'il est, égal en chaleur ! Et si tu veux encore plus, que cela me serait facile !» Alors Schamsennahar et Ali ben-Bekar poussèrent un soupir ; et une seconde chanteuse, sur un rythme différent, à un signe de la belle favorite, dit : «O bien-aimé ! lumière qui illumines l'espace où sont les fleurs, yeux du bien-aimé ! «O chair poreuse qui filtres la boisson de mes lèvres, ô chair poreuse si douce à mes lèvres ! «O bien-aimé ! quand je t'ai trouvé, la beauté m'a arrêtée pour me chuchoter : le voici ! Il a été modelé par des doigts divins ! Il est une caresse, telle une riche broderie !» A ces vers, le prince Ali ben-Bekar et la belle Schamsennahar se regardèrent longuement ; mais déjà une troisième chanteuse disait : «Les heures heureuses, ô jeunes gens, s'écoulent comme l'eau, rapides comme l'eau. Croyez-moi, amoureux, n'attendez pas. «Profitez du bonheur lui-même. Ses promesses sont vaines ! Usez de la beauté de vos années et du moment qui vous unit.» (à suivre...)