Portrait n En hidjab sombre, la jeune femme est accompagnée de ses deux enfants. Son état indique réellement les souffrances qu'elle a subies. «Pas question que je vous parle de mon passé noir». Hésitant un moment, Zahia revient à de meilleurs sentiments, et accepte, enfin, de nous livrer quelques miettes de sa vie. Elle s'est mariée très jeune, «mes parents m'ont forcée», explique Zahia. Pendant qu'elle parle, ses deux enfants, des petites filles, vêtues de vêtements usés et sales, jouent près d'elle. Elles chantent et taquinent les passants, en leur demandant de l'argent, même ces petites filles ont appris la technique. Zahia continue son récit. Après son mariage, les choses fonctionnaient bien. Avec un mari honnête et travailleur, rien ne manquait à son bonheur que des enfants qui n'ont pas tardé d'ailleurs à venir, deux fillettes mignonnes, Nawel et Samia. Le couple ne manquait de rien, «le rêve de tout le monde» murmure-t-elle. L'orage est arrivé quelques années après pour s'installer. Et le bonheur s'est évaporé, se transformant en un cauchemar. Le mari idéal s'est transformé en un animal enragé, quittant la maison tôt le matin et n'entrant qu'à une heure tardive de la nuit, soûl, ivre. Celui-ci devenait alors une tempête déchaînée et violente à 1h ou 2h du matin; réveillant même les voisins. «Je n'arrivais plus à supporter une telle situation, je devais trouver une solution», raconte Zahia avec beaucoup de tristesse. Des larmes commencent à sillonner ses joues et elle ajoute sans s'attarder sur les détails que même ceux censés être à ses côtés à ce moment-là, «ses parents», l'ont totalement, ignorée et abandonnée à son triste sort. Zahia est restée accrochée à ses deux petites filles, acceptant sa situation. Pour elle le destin a sa part dans ce qui se passe : «C'est écrit.» Questionnée à propos des centres d'assistance sociale, elle hésite un moment puis : «Je n'arrive pas à admettre que mes deux fillettes soient éduquées dans un centre d'assistance sociale.» Elle a refusé catégoriquement l'idée, y voyant la perte de ses deux filles qui serait pour elle «la mort avant terme». «Je me suis retrouvée dans la rue sans le savoir, je n'ai pour le moment que ces couvertures comme demeure et le ciel pour toit, rien d'autre». «Je sais bien que je ne suis pas la seule à mendier d'autres le font comme moi et partout dans le monde.»