Du poisson étalé à même le sol devant un égout, des fruits exposés à longueur de journée au soleil et du pain pollué par les gaz d?échappement. Devant de tels spectacles, on serait tenté de croire que ces produits n?ont aucune chance d?être écoulés. Malheureusement, les faits démontrent le contraire. Il y a certains irréductibles qui se bousculent pour être servis les premiers dans nos marchés. Abordés dans différents marchés de la capitale pour s?expliquer sur cette étrangeté, ces «clients» donneront de drôles de justifications. «Une fois à la maison, l?eau de javel se chargera des microbes. De plus, après cuisson, il n?y a plus de danger», dira une dame rencontrée au marché de Bab El-Oued. Un client près d?elles indiquera, pour sa part, qu?il suffit d?être vigilant : «J?ai toujours le vendeur à l??il, ainsi il ne pourra pas me vendre n?importe quoi.» Des prix compétitifs auraient poussé ces clients à porter leur choix sur des produits qui laissent à désirer en matière d?hygiène. «Détrompez-vous», déclare ce père de famille, croisé près du marché Trois-Horloges à Bab El-Oued. «Ici, on ne fait pas de cadeaux. Tous les moyens sont bons pour plumer le citoyen», ajoutera-t-il. Après une tournée dans les marchés de la capitale, on constatera que les prix affichés sont identiques. Il arrive même que les marchandises vendues à l?extérieur des marchés coûtent plus cher. Toutefois, on ne risque pas sa vie sans raison. A cet effet, un homme nous dira qu?il préfère éviter la foule à l?intérieur du marché. «Je déteste toutes ces bousculades», dira-t-il. Risquer sa santé pour éviter une bousculade, n?est-ce pas trop cher payé ? A cette question, notre interlocuteur ne trouvera pas de réplique ; il se contentera seulement de hausser les épaules. Un autre client évoquera le fait que les marchandises vendues à l?extérieur des marchés sont plus fraîches. Cela reste à prouver, à voir les nuées de mouches et les chats tout autour de ces marchandises. Certes, l?absence des pouvoirs publics a encouragé ce genre de commerce dans un environnement douteux et malsain. Cependant, le citoyen a une part de responsabilité. Si ces vendeurs avaient été boudés par des clients soucieux de l?hygiène, un tel commerce aurait disparu depuis longtemps.