Résumé de la 84e partie n Neeve et Myles refont le récapitulatif de la soirée d'hier. Aujourd'hui, c'est l'enterrement de Nicky Sepetti, le chef de gang mafieux. Les tasses, les soucoupes, le pichet et le pot de crème venaient de la famille de Myles. Une porcelaine anglaise bleue à motifs chinois. Neeve ne pouvait envisager de commencer la journée sans ce service à petit déjeuner. Elle examina attentivement Myles. Il avait l'air d'être redevenu presque lui-même. Ce n'était pas seulement à cause de Nicky Sepetti. C'était la perspective de se remettre à travailler, d'accomplir quelque chose d'utile. Elle savait à quel point Myles déplorait le trafic de drogue et le carnage qu'il provoquait. Et qui sait ? A Washington, il rencontrerait peut-être quelqu'un. Il devrait se remarier. Il était encore sacrément séduisant. Elle lui en fit la remarque. «Tu l'as déjà dit hier soir, lui rappela Myles. Je pense d'ailleurs proposer mes services pour la double page de Playgirl. Crois-tu que j'aie mes chances ? — S'ils acceptent, les nanas vont faire la queue à ta porte», lança Neeve en emportant son café dans sa chambre, décidant qu'il était grand temps de se mettre en mouvement et d'aller travailler. Lorsqu'il eut fini de se raser, Seamus se rendit compte que Ruth avait quitté l'appartement. Il resta désorienté pendant un moment, puis traversa l'entrée d'un pas pesant, entra dans la chambre, dénoua la ceinture du peignoir-éponge marron que les filles lui avaient offert pour Noël, et se laissa tomber sur le lit. La fatigue qui l'accablait était telle qu'il avait peine à garder les yeux ouverts. Tout ce dont il avait envie, c'était de se remettre au lit, de tirer les couvertures par-dessus sa tête et dormir, dormir, dormir. Pendant toutes ces années difficiles, Ruth n'avait jamais fait chambre à part. Parfois, ils passaient des semaines, des mois à la file sans jamais se toucher, tellement tourmentés par les ennuis d'argent qu'ils avaient l'estomac tordu, mais même alors, par une sorte de consentement tacite, ils avaient partagé le même lit, liés par la tradition qu'une femme doit dormir aux côtés de son mari. Seamus contempla la chambre, la voyant avec les yeux de Ruth. Le mobilier acheté par sa mère lorsqu'il avait dix ans. Pas ancien, seulement vieux - le placage d'acajou, la glace qui penchait dangereusement sur ses montants au-dessus de la coiffeuse. lI revoyait sa mère en train de cirer ce meuble, s'activant, fière du résultat. Pour elle, l'ensemble complet, lit, coiffeuse et commode, avait représenté un aboutissement, le rêve comblé d'une «belle maison». Ruth découpait dans Beautiful House les photos du genre de pièces qu'elle aurait souhaité avoir. Des meubles modernes. Des tons pastel. Une ambiance claire. Les problèmes d'argent avaient mis fin à ses espoirs et effacé la gaieté sur son visage, elle était devenue trop sévère avec les filles. Il se souvint du jour où elle avait hurlé contre Marcy : «Comment ça, tu as déchiré ta robe ? J'ai économisé jusqu'au dernier cent pour l'acheter. » (à suivre...)