Patrimoine n Le chant sraoui est depuis lundi à l'honneur à Constantine. Ces concerts, animés par une troupe de l'association «Tassili pour l'art et la culture», spécialisée dans les chants du terroir, rencontrent un écho très favorable et un grand engouement auprès du public constitué en majorité de jeunes. Considéré comme l'un des affluents principaux de la chanson folklorique algérienne, le chant sraoui, est pratiqué surtout dans les hautes plaines du nord Est du pays et chez les Chaouia, avec de légères différences d'interprétation d'une région à une autre, explique M. Lagliz, président de l'association «Tassili». Ses paroles sont un mélange de poésie populaire (Melhoun) et de chants populaires exécutés pendant les fêtes familiales de mariage, de circoncision, religieuses, ainsi que lors des moissons-battages. Un relent de tristesse empreint souvent, cependant, les paroles de ce chant qui tire ses origines des souffrances et des tragédies endurées par le peuple pendant l'époque coloniale. L'on y retrouve notamment des allusions à la douleur des mères qui voyaient leurs enfants enrôlés de force dans l'armée coloniale ainsi qu'aux massacres qui ont suivi les manifestations du 8 mai 1945. Des titres significatifs comme Tiara safra (l'avion jaune), en référence aux appareils qui bombardaient les populations, ou encore El machina el kahla (le train noir), ce train qui emmenait les jeunes algériens vers le front, sont toujours retenus par la mémoire collective. Si dans les régions de Jijel et Sétif ces chants sont quelquefois accompagnés par des instruments traditionnels, comme la zorna, dans les régions de Ain M'lila, Chelghoum Laid et Constantine, on préfère le nay, cet instrument plaintif qui rend si bien les états d'âme de gens du terroir. Parmi les chanteurs qui se sont rendus célèbres dans le chant sraoui, et qui sont restés dans la mémoire collective, on retient les noms de Beggar Hadda, Brahim Chouaï, Chabba Zoulikha, Bekakchi El Kheier, Teldja et Abdelhamid Ababsa, qui ont fait la gloire de ce chant avant que de jeunes chanteurs ne viennent récemment s'approprier ce genre et le moderniser en y introduisant des instruments musicaux modernes comme le fait aujourd'hui la troupe de l'association Tassili. Après cette manifestation «test», l'association Tassili projette d'aller plus loin dans la diffusion de ce genre folklorique en lui consacrant un festival national qu'elle prévoit d'organiser durant l'été prochain.