Les juges ont réprouvé l'action menée par les avocats, considérée «comme pression morale et psychologique». Cette position des magistrats n'est pas pour arranger les rapports entre les deux corporations. Un conseil extraordinaire est prévu pour demain à Alger. Décidé à la suite de la réunion extraordinaire tenue hier au siège du bâtonnat de Tlemcen, ce conseil a pour objectif de faire le point sur la situation, établir un bilan de la journée de protestation et ouvrir le débat sur les suites à donner. Quant aux décisions, elles seront communiquées le lendemain à l'occasion de l'assemblée générale extraordinaire. Hier, les avocats ont boudé les Cours de justice à travers tout le territoire national. Une journée de protestation largement suivie par les robes noires. Aucune affaire n'a été jugée pratiquement, à l'exception de celle par laquelle tout a commencé. Il s'agit du procès de l'avocat Ahmed Chatri, du Barreau de Tlemcen. Treize bâtonniers et plus de 200 avocats se sont déplacés au tribunal de Remchi pour assister leur collègue jugé pour dénonciation calomnieuse et outrage à magistrat. L'affaire fait suite à un dépôt de plainte effectué par Me Chatri à la demande de son client contre une juge d'instruction. La magistrate aurait pris la décision de maintenir en prison le client bien que la chambre d'accusation ait opté pour sa mise en liberté. Devant la cour de Remchi, avocats et bâtonniers venus de tous les coins d'Algérie se sont retirés pour ne pas cautionner «cette bêtise», selon Me Sellini, le bâtonnier national. L'affaire a tourné court. L'avocat, devenu accusé, s'est présenté à la barre revêtu de sa robe noire. La magistrate lui ordonne de l'enlever. Il refuse catégoriquement, signifiant à la juge qu'il a été accusé en tant qu'avocat, il comparaîtra donc en tant que tel. La magistrate décide alors de la mise en délibéré de l'affaire et annonce que le verdict sera rendu le 17 juin. Ils sont 39 avocats poursuivis en justice en Algérie. Et c'est l'une des raisons qui a décidé les avocats à entreprendre leur mouvement. D'ailleurs, ils exigent dans leur plateforme de revendications «la cessation des poursuites judiciaires à l'encontre des 39 avocats» et «le respect des droits du collectif de défense et de la dignité de la profession». Par ailleurs, dans un communiqué signé hier par le président du Syndicat national des magistrats (SNM), Djamel Aïdoun, les juges se sont complètement désolidarisés de la corporation des avocats. «Nous refusons catégoriquement les agissements constatés actuellement de la part de la défense envers les magistrats et qui constituent des pressions morales et psychologiques», lit-on dans ce communiqué. Rappelons que si le mouvement de protestation des avocats des 48 wilayas que compte le pays devait durer une journée, la grève au niveau des tribunaux d'Alger est illimitée. Les avocats de la Cour d'Alger revendiquent entre -autres «des espaces au niveau du nouveau siège de la cour, permettant à quelque 3 000 avocats au niveau de cette juridiction d'exercer dans de bonnes conditions».