Projection n L'arrivée de Gordon Brown au 10, Downing Street, devrait marquer un changement de style par rapport à celui de Tony Blair, mais les analystes n'attendent pas de grandes inflexions dans la politique britannique. «M. Brown doit se présenter à la fois comme quelqu'un de nouveau, il doit montrer qu'il a renouvelé le gouvernement, et en même temps il doit faire preuve de loyauté envers un gouvernement dont il a fait partie pendant dix ans. C'est un exercice d'équilibre difficile», souligne George Jones, professeur émérite à la London School of Economics (LSE). Gordon Brown fait partie du gouvernement qui a décidé en 2003 la participation britannique à l'invasion de l'Irak. A présent, tout en excluant un retrait immédiat des troupes britanniques d'Irak, il reconnaît que des erreurs ont été commises. Pour Paul Williams, auteur du livre La politique étrangère britannique du New Labour, 1997-2005, l'arrivée de Gordon Brown à la tête du gouvernement britannique n'aura pas d'«impact majeur» sur la politique étrangère britannique. Avec Tony Blair, il a forgé la philosophie du New Labour, et malgré leur animosité personnelle qui s'est développée au fil des ans, ils se retrouvent sur une ligne identique sur la plupart des sujets. M. Brown est clairement atlantiste, comme Tony Blair, mais il s'est engagé à être «très franc» avec le président américain. Une façon de prendre ses distances avec l'attitude de Tony Blair, raillé comme le «caniche» de George W. Bush. Plus méfiant vis-à-vis de l'Europe que M. Blair, Gordon Brown devrait chercher à ouvrir l'Union européenne à la mondialisation et à la rapprocher de Washington. Fermement antiprotectionniste, il s'efforcera de convaincre les dirigeants européens d'adopter les mêmes recettes économiques qu'il a appliquées avec succès en Grande-Bretagne, en prônant la libéralisation et les privatisations, selon M. Jones. Il refuse en revanche de ressusciter le projet de constitution européenne, que Tony Blair avait promis de soumettre aux électeurs britanniques, préférant un nouveau traité. M. Brown a déjà dit son soutien envers un renforcement des lois antiterroristes en Grande-Bretagne et devrait sur ce plan poursuivre la politique de Tony Blair. «Je m'attends à ce qu'il accorde plus d'importance à la sécurité des citoyens britanniques qu'aux lobbies qui défendent les libertés civiles», estime M. Jones. Gordon Brown a cependant suggéré une réflexion sur le besoin d'une Constitution écrite en Grande-Bretagne et envisage de donner au Parlement plus de contrôle sur le gouvernement en cas d'entrée en guerre. Gordon Brown a aussi mis l'accent sur le besoin de renforcer le sentiment d'identité britannique pour contrer l'extrémisme ou les velléités d'indépendance des Ecossais. Il veut aussi améliorer l'intégration des étrangers en Grande-Bretagne, en les encourageant à apprendre l'anglais et promet de renforcer le système éducatif pour donner à chacun la chance de pouvoir réaliser ses aspirations.