Résumé de la 1re partie n Chassé de son pays, Vladimir s'engage dans la légion étrangère où il se fait un ami. Au bout du parcours, il finit sa vie seul. Le litre de vin rouge passe de main en main, chacun se sert une rasade au passage. Vladimir finit la bouteille. Puis, il retrousse lentement les deux jambes de son pantalon. — Défais carrément ton futal, ça ira plus vite ! Mais Vladimir suit le même cérémonial à chaque fois qu'il «les fait voir». Quand il a roulé le pantalon jusqu'à la hauteur des genoux, il prend un temps qui énerve son public : — AIlez, ne fais pas ton cirque, montre-les ! VIadimir demande : —Y a plus rien à boire ? — ?a suffit. Tu as assez bu. Fais-les voir. Avec les gestes lents d'un artiste de music-hall, Vladimir roule un peu plus la jambe gauche du pantalon. Sur le genou dénudé on voit apparaître un tatouage : un visage de femme. L'artiste qui a fait le tatouage a certainement travaillé d'après une photographie. Le portrait est d'une grande précision : celui d'une blonde un peu vulgaire avec de grands yeux bleus, une bouche couleur de fraise écrasée. Elle tient entre ses lèvres une cigarette dont la fumée va se perdre dans le pli du genou. Sous le visage un prénom : Josiane. Un des clochards s'écrie : — Quelle belle môme ! Un autre commente : — Depuis que VIadimir s'est fait tatouer, elle a dû prendre de la bouteille, comme les copines... VIadimir proteste : — Non, j'ai fait ça il y a dix ans. Elle est toujours pareille. Il ajoute, l'air désabusé : — Voilà, c'est elle ! J'aurais donné ma vie pour elle ! La vache ! Les hommes du cercle se poussent du coude. Ils attendent la suite : l'autre genou. VIadimir commence à rouler la jambe droite de son pantalon. Sur le genou droit, un autre tatouage : le visage d'un homme. Un brun à moustache, une mèche sur le front. Les yeux sont noirs, d'un style un peu orientaI. VIadimir l'a fait représenter avec un chapeau mou. De toute évidence ce monsieur n'a pas bon genre, le style d'un souteneur des mauvais quartiers. Sous le visage un prénom : Valentin. Quelqu'un qui ne connaît pas l'histoire demande : — Qui c'est, celui-là ? Un autre lui donne une borade pour le faire taire. Mais VIadimir, qui a entendu la question, répond sans émotion : — Celui-là, c'est le salaud qui m'a volé ma femme. Mon meilleur copain. Nous étions comme deux frères. Mais ils ne me connaissent pas. Je peux des choses dont personne ne se doute. Je n'ai qu'un geste à faire. Ce geste, je le fais, et les ennuis dégringolent sur ceux qui m'énervent. — Quel geste, VIadimir ? Quel geste ? — Simplement ça ! Doucement, VIadimir commence à frotter ses deux genoux l'un contre l'autre. Doucement mais fortement, comme s'il cherchait à écraser entre ses deux rotules un insecte malfaisant. Un coup de tonnerre fait sursauter la compagnie qui en a pourtant vu d'autres. Un des clochards demande : — C'est tout ? C'est ça, ton geste ? ?a n'a pas l'air de faire bien maI. Quelqu'un explique à voix basse : — Il faut se méfier, VIadimir a été en Afrique. Là-bas, il vivait avec une Congolaise qui lui a appris des trucs africains. De la magie... Moi, je ne m'y fierais pas. J'aime mieux ne pas avoir d'histoire avec Vladimir... Il connaît des méthodes pour tuer à distance, à ce qu'on m'a dit ! (à suivre...)