Peine Et l?amertume latente qui sommeille en elle la submerge et fait battre son c?ur. Ouardia interrompt soudain sa phrase et dit, en se tournant vers Fatma, sa jeune bru : ? Fatma, c?est toi qui aurais dû préparer le café, tu sais si bien le faire ! Oh ! Celui de Bahia est si léger ! Pouah ! Et elle prend une mine dégoûtée. Fatma sourit, satisfaite. Bahia, le visage pâle, pose devant sa belle-mère le petit plateau de cuivre ciselé, garni de tasses peintes de jolies fleurs bleues. D?une main qu?elle essaie de garder ferme, elle sert le breuvage odorant, et présente une assiette pleine de «kaât enakache» encore tièdes. ? Reste avec nous, Bahia, pourquoi t?isoles-tu toujours ? ? Non, j?ai à faire dans la cuisine. ? Reste avec nous, insiste sa belle-mère? Tiens, assieds-toi là près de moi ! Bahia, prend place sur le petit matelas recouvert d?un léger tapis et après avoir rempli sa tasse, lève les yeux vers sa belle-s?ur. Fatma lui sourit. Son sourire est celui d?une femme comblée et qui a toutes les raisons d?être heureuse. Bahia a un léger sursaut, et l?amertume latente qui sommeille en elle, la submerge et fait battre son c?ur plus fort. Tandis que les deux femmes reprennent leur conversation sur un ton léger, Bahia reste silencieuse. Près d?elle, le jet de la petite fontaine, située au milieu de la cour, déverse son eau claire, en chantonnant. Ouardia repose doucement sa petite tasse, et demande : ? Si c?est un garçon, comment vas-tu l?appeler ? ? Je ne sais pas encore, Yemma, nous laisserons ce soin à son grand-père ! Bahia a comme un coup au c?ur ; ainsi donc, Fatma est enceinte, tandis qu?elle? ? Mabrouk alik ! dit-elle, en se forçant à sourire. ? Laâqouba lik ! ? Oh, cette pauvre Bahia ! dit sa belle-mère, elle n?a plus aucun espoir, après six longues années, et tous les médecins qu?elle a vus ! Bahia baisse la tête et ne répond pas. ? Mon pauvre fils n?a pas de chance. Autour de lui, ses amis ont des enfants mais lui?Ya hêznou ! Et elle continue. ? Je suis très heureuse Fatma, il m?appellera «Maïma !» Oh ! J?attends ce jour avec impatience. Tu dois préparer son trousseau dès maintenant? Et les deux femmes papotent, sans plus s?occuper de la présence de Bahia. Elle se retire comme une voleuse, traverse la cour et monte au premier étage, dans sa chambre. Tout lui semble vide autour d?elle, et la maison lui semble soudain devenue comme une prison dont elle voudrait écarter les barreaux et sortir pour respirer. (à suivre...)