Paradoxe n C'est durant le mois sacré du ramadan que les jeux de société, parfois apparentés à des jeux de hasard, suscitent l'engouement. La pratique des jeux de société durant le ramadan est une tradition séculaire en Algérie. C'est l'une des rares traditions – en dehors, bien entendu, des comportements prescrits par la religion, tels que la prière des taraouih et autres… – à avoir la peau dure et à résister au temps. Ni le changement des mentalités et des rapports sociaux ni l'irruption des inventions technologiques – la télé, l'Internet, le téléphone portable – n'ont réussi à éradiquer une telle pratique. Même si, reconnaissent certains «anciens», les choses ne sont plus ce qu'elles étaient, il y a seulement quelques décennies. En ce sens que les jeux de société ont quelque peu cédé du terrain au profit de la télévision, de l'Internet… Mais les adeptes «occasionnels» des dominos et de la ronda, ce jeu de cartes introduit par les Espagnols, sont toujours aussi nombreux. Il y en a même qui sont devenus accros. Ceux qui prennent le chemin du café maure du coin, sitôt la dernière cuillère de chorba avalée. Ce sont des adeptes de jeux, de dominos notamment, qui jouent toute l'année mais augmentent la dose durant le ramadan. Toute la soirée, ils ne font que cela ! De la rupture du jeûne jusqu'au s'hour. Soit plusieurs heures d'affilée, selon la saison avec laquelle coïncide le ramadan. Les plus pieux trouvent tout de même le temps d'interrompre leur partie pour aller faire la prière à la mosquée et reprendre par la suite… Mais il y a aussi ceux qui jouent occasionnellement, une à deux parties par soirée. Histoire d'imiter les autres. Il y a enfin, les nostalgiques qui, en distribuant les cartes où en «mélangeant» les 28 cubes qui forment le jeu de dominos, se rappellent «la belle époque», et le «bon vieux temps»… Les jeux de société sont répandus dans la société algérienne et font partie des loisirs des citoyens aux quatre coins du pays. Cela ne fait pas l'ombre d'un doute, les dominos, par exemple, sont en passe de devenir un sport national. Les enfants apprennent ses règles et ses «astuces» dès leur plus jeune âge. Une question mérite cependant d'être posée : pourquoi l'engouement pour les jeux de société se fait-il plus important durant le mois de ramadan ? Car il est aujourd'hui admis, et aucune région du pays n'échappe à la règle, que les dominos et les jeux de cartes sont le loisir favori des Algériens durant les soirées du mois sacré. Une situation pour le moins paradoxale d'autant plus que les jeux de société, tels que pratiqués dans notre pays, sont parfois apparentés à un jeu de hasard. Ce qui est complètement incompatible avec les préceptes de la religion musulmane. Un phénomène qui reste inexpliqué. Même si certains tentent de remonter plus loin dans le temps pour tenter de comprendre ses origines et affirment qu'il s'agit là d'une pratique héritée d'une époque où les moyens de distraction n'existaient pas. Or, la tradition religieuse (la sunna) et la réalité du jeûne veulent que tout jeûneur prenne un repas (le s'hour) à une heure tardive de la nuit. Et en attendant cette «heure tardive», il fallait, une occupation, une distraction…