Constat n Rien que dans la wilaya d'Alger plus de 650 000 bâtisses inachevées sont comptabilisées, selon Abdelhamid Boudaoud, président du Collège national des architectes intervenu, hier, sur les ondes de la chaîne III. «On voit des rez-de-chaussée finis destinés à un usage commercial avec même des registres du commerce – à Alger, il y en a 700 000 – et le reste on le laisse en l'état. Cela veut dire que ces gens-là (les propriétaires) n'ont pas besoin de logements.» Ce phénomène a pris une telle ampleur que le président de la République, lors de la visite effectuée en juin dernier à Sétif où un projet de loi obligeant les propriétaires à terminer la construction de leurs bâtisses est né, y fait allusion. Mais n'est-il pas déjà trop tard ? «Cette loi n'est pas tardive. Mais il faut savoir qu'en amont, il y a une autre loi pour le permis de construire. Ce dernier est valable pour un délai de trois ans plus une année de renouvellement du dossier et l'on constate que les constructions inachevées ont au minimum 10 ans», ce qui pousse M. Boudaoud à se poser la question : «Où étaient les collectivités locales ?» «L'Algérie est le seul pays au monde où l'on délivre une décision de terrain avec un permis de construire par la commune. Et à partir de là, le citoyen n'est pas suivi. D'ailleurs, ce dernier ne demande le permis de construire que parce que la banque l'exige pour lui délivrer un prêt.» Quant à la responsabilité de l'architecte dans cette anarchie régnante, le président du Collège répond : «L'architecte n'a aucune responsabilité, il est là seulement pour faire une étude et la remettre au citoyen. Il est souhaitable de voir l'étude. Celle-ci est une chose et la réalisation en est une autre. Là ou l'architecte arrive à faire des prouesses techniques malheureusement, le maître de l'ouvrage n'arrive pas à réaliser ce que l'architecte avait conçu.» «On aurait souhaité qu'il y ait un contrôle par l'homme de la rue, poursuit-il. S'il doit y avoir une extension ou des travaux hors normes, il le signale aux responsables pour l'arrêter. Maintenant, comme il y a 650 000 bâtisses inachevées à Alger, il faudrait faire une expertise pointue au cas par cas et voir si on arrive à régulariser ou pas». Abordant le sujet épineux concernant la crise du logement que connaît le pays, M. Boudaoud regrette le défaut de sollicitation des architectes dans le processus de construction des logements sociaux. «On n'a jamais demandé à un architecte de faire une étude pointue et de dire voilà le logement social, voilà ses matériaux, voilà son prix au mètre carré. En 1970, le mètre carré était à 1 000 DA. De nos jours, il fait 25 000 DA. Et même à ce prix, il ne répond pas au prix réel du mètre carré. Le citoyen ne pourra jamais acheter un logement à ce prix-là, il lui faudrait 80 à 100 ans de travail sans toucher son salaire. Quand il voit le LSP ou le logement social, il lui faudrait 30 ans pour rembourser le prêt de l'Etat.» Pour ce qui est de la réalisation du programme du président de la République, à savoir la construction de 1 million de logements, M. Boudaoud déplore le manque d'informations autour des entreprises de réalisation algériennes. «Comme on ne connaît pratiquement pas nos entreprises, on fait appel aux entreprises étrangères pour réaliser et répondre au million de logements. On a 26 000 entreprises, si on donnait la réalisation de 100 logements à chacune des 26 000 entreprises algériennes en 1 an, on aurait eu 2,6 millions de logements.»