Création n Une exposition, placée sous le thème «Regards croisés, du désert… à la mer» se tient à la Bibliothèque nationale. L'exposition est une performance artistique. Elle associe deux artistes, Farida Sellal (artiste photographe) et Amor Dris Dokman (artiste peintre), autour d'un travail artistique conjoint : l'un étant la continuation de l'autre – notamment dans l'imaginaire. Photographies et tableaux (peinture) se croisent, s'associent, se complètent et se prolongent. «C'est un travail en duo», a expliqué Amor Dris Dokman, ajoutant : «L'idée consiste à travailler sur la photographie.» Ainsi, Amor Dris Dokman, habitué à des initiatives individuelles, s'engage dans une nouvelle aventure artistique, à toucher à une expérience nouvelle et approfondir ses connaissances en matière de peinture. Le principe est simple : à partir des photographies prises par Farida Sellal où celle-ci a immortalisé sur la pellicule l'instant et le lieu, Amor Dris Dokman transpose sur la surface du tableau, en usant aussi bien de son imagination que de sa sensibilité, tout le contenu – il y a une mise en situation soignée et élégante de ce que l'œil a retenu, a enregistré sur la photographie. L'opération s'avère à première vue fort aisée dans la mesure où nous est offert un travail fini, mais à en tenir compte de la manière dont cela s'est fait, l'on s'aperçoit qu'un effort de créativité s'impose. Un exercice de réflexion et de recherche, aussi. Cela nécessite également une grande part d'inspiration, de goût et d'acuité artistique. Il ne s'agit pas de reproduire tout bonnement et littéralement ce qui est représenté dans la photographie (la mer, le désert, des hommes et des femmes, des paysages, des oiseaux…), mais de peindre l'image autrement, de la recréer dans un élan d'exaltation en couleur et en de nouvelles formes graphiques. Il recrée une nouvelle fois et le temps et l'espace. Il y a en fait une transfiguration du monde matériel et sa conversion immédiate en une existence éthérée. Son inspiration continuellement en mouvement – et en régénération – s'emploie à montrer un imaginaire sincère, fluide, exubérant et séduisant tant les couleurs sont naturelles d'une abondance saisissante ainsi que d'une grande expressivité. Un joli florilège d'impressions chromatiques. La peinture de Amor Dris Dokman – un artiste à l'instinct libéré et aux sens fervents et débridés – est dépouillée de matérialité. C'est une expression – même si le contenu est d'une visibilité distincte – relevant directement de l'abstrait. D'une vision onirique, voire fantasmatique. Elle est aussi une fantasmagorie nourrie, d'abord, par la sensibilité de l'artiste et, ensuite, par ses rêveries même les plus intimes. Sa peinture que l'on fait sienne et à laquelle on s'attache tant elle est belle et séduisante et nous impressionne en nous faisant rêver éveillés, se révèle à incidence poétique. C'est une poésie en effet qui se dit seulement en couleurs délicatement choisies.