Résumé de la 1re partie n Edwin Ramundsen, 55 ans, prédit sa mort dans 18 ans. Le docteur Molmonar ne le prend pas au sérieux. Mieux encore, il parie sur la date de sa mort… Edwin Ramundsen secoue la cendre de son cigare : — Pourquoi je connais la date ? C'est un rêve que je fais souvent. Je suis en train de marcher dans la rue et je me vois en train de lire un journal, l'Arbetet. Je vois très nettement la date : 27 mai 1970. — Et alors, le fait que vous rêviez que, le 27 mai 1970, vous êtes en train de lire le journal du jour, dix-huit ans à l'avance, n'indique en rien que vous allez mourir ce jour-là, non ? — Mais ensuite ce rêve que je fais régulièrement est très clair. Je rêve très distinctement d'un camion : un poids lourd. Le chauffeur dévale la rue et me percute de plein fouet. Je suis mort... Le docteur Molmonar reste un moment perplexe. Il secoue la tête comme pour essayer de protester. Mais quels arguments logiques opposer à ce rêve ? — Et vous faites souvent des rêves prémonitoires, mon cher monsieur Ramundsen ? — Justement, jamais. C'est pourquoi celui-ci m'impressionne à ce point. Mais je me suis fait une raison. Autant mourir d'un seuI coup. Dans mon rêve, je ne vois pas le poids lourd arriver : je suis trop occupé à lire mon journal. Le docteur Molmonar se lève : — Bon, moi je vous dis que ce rêve n'est qu'un rêve. — Et moi, je vous enverrai 1 000 couronnes le 27 mai 1970 au matin car je serai mort ce même jour. Le 28 mai 1970, par une belle matinée, la boutique d'articles de sport reste obstinément close bien que la foire batte son plein dans les rues alentour. On s'étonne : — Bizarre que Ramundsen n'ait pas ouvert son rideau de fer. Ce n'est pas un homme à laisser passer la foire sans ouvrir sa boutique. — Et si quelque chose lui était arrivé ? C'est dans l'ordre des choses possibles. Quel âge a-t-il après tout ? — Ben, je crois qu'il doit avoir dans les soixante-treize ans, plus ou moins. — Oui, c'est à peu près ça. Il voulait s'engager dans la Légion étrangère en 14-18, mais il a dû attendre un peu car il était trop jeune au début de la guerre. On frappe encore au rideau de fer, on sonne à la porte de l'appartement qui est juste au-dessus de la boutique. Aucune réponse. On prévient alors la police qui fait procéder à l'ouverture. Pas de doute, Edwin Ramundsen est mort et bien mort. Eh bien, le pauvre vieux, il ne s'est pas vu partir. Mort dans son lit. En dormant. Au fond, c'est la mort idéale. On s'endort et on se réveille au paradis. — Et qu'est-ce qu'on va faire pour l'enterrement ? Qui va payer ? En fouillant dans le bureau proche de la chambre du mort, on trouve des papiers. Pas de doute : Edwin Ramundsen était un homme organisé. Il avait tout prévu. Et même bien davantage que le commun des mortels… On trouve une enveloppe sur laquelle M. Ramundsen a marqué au crayon gras : «En cas de décès...» Comme si quelqu'un pouvait ne jamais mourir ! Dans cette enveloppe, un papier indique que, depuis de nombreuses années, Edwin Ramundsen est propriétaire d'une concession à perpétuité dans le cimetière communal. (à suivre...)