Résumé de la 1re partie n Chloé, terrorisée par le tableau représentant la Pythie, tarde à rejoindre son père dans le salon des batailles... Chloé lève un regard peu rassuré vers la Pythie. Heureusement que son père lui affirme qu'il s'agit d'une femme car cette Pythie au regard féroce, possède des muscles de lutteur. Chloé voudrait éviter son regard, mais on dirait que la Pythie la fixe. On peut se réfugier dans n'importe quel angle de la chambre, le regard de la Pythie, sous d'épais sourcils froncés, suit le visiteur. De toute évidence le peintre l'a saisie au moment où elle annonçait une catastrophe aussi épouvantable qu'inévitable. La bouche est grande ouverte dans un rictus qui découvre des dents de loup. Chloé se décide et dit : — Père, je voudrais changer de chambre. Pour arriver dans la mienne, il faut que je traverse la chambre de la Pythie. Soir et matin. Et, quand je me couche, je fais des cauchemars après l'avoir vue. Même si je ferme les yeux quand je traverse la pièce. — Ma petite Chloé, la vie n'est pas simplement un chemin semé de roses. Tu dois triompher de ta peur. Un tableau n'est rien d'autre qu'un morceau de toile peinte, dans un cadre doré. — Et si vous mettiez la Pythie dans une autre partie du château ? — Impossible, elle a été peinte pour être ici, juste au-dessus de la porte sud. Tout va ensemble, le cadre et les boiseries. Si je l'ôtais, il faudrait que je la remplace par une autre peinture. Cela dépareillerait un ensemble que l'on dit unique en Suisse. Il n'en est pas question, mon enfant. Chloé n'insiste pas. Mais elle ne peut se défaire de cette panique qui la saisit. Désormais, les séjours au château sont continuellement gâchés par l'idée qu'il faut affronter plusieurs fois par jour le regard de la Pythie. Un regard chargé de haine. Elle se persuade peu à peu que la Pythie lui en veut. Qu'elle n'est là que pour lui annoncer un destin tragique. Le prince n'est pas un méchant homme. Un jour, il annonce, l'air de rien, une nouvelle d'importance : — Ma chère Chloé, j'ai décidé de faire quelques aménagements au château. J'ai l'intention de faire percer une petite porte dans ta chambre. Ce sera plus commode pour rejoindre la salle à manger. Plus besoin de traverser la chambre de la Pythie. Et cela fera des économies de chauffage. Par les temps qui courent... — Mais alors, je n'aurai plus besoin d'affronter cette horrible femme tous les jours ? Je pourrais passer par la galerie des porcelaines chinoises ? — Eh oui, plus de Pythie pour effrayer ma Chloé. Tu es heureuse ? — Je ne serai heureuse qu'en quittant ce château. Oh, pardon, père, ce n'est pas ce que je voulais dire ! Je ne serai heureuse qu'en m'éloignant définitivement de cette horrible peinture. Ou en l'éloignant de moi... Alors qu'elle vient d'atteindre ses dix-huit ans, Chloé est demandée en mariage par un des officiers de la garde personnelle du prince. Celui-ci se réjouit de cette union car il apprécie le jeune baron Gerhardt de Thornweld et voit en lui un officier au brillant avenir. Chloé, quant à elle, est devenue une des plus jolies femmes de la noblesse helvétique. — Pour célébrer ton mariage, il faut que la cérémonie ait lieu au château. C'est le seuI cadre convenable pour cet événement. Chloé est tout à fait d'accord. Depuis que le prince a fait, cinq ans plus tôt, les aménagements des appartements privés, Chloé a oublié l'horrible Pythie et sa bouche grande ouverte pour annoncer le malheur. Le prince et Chloé organisent une fête brillante. Après la cérémonie dans la chapelle du château, pavée, depuis plus de cinq cents ans, par les dalles funéraires familiales, vient la fête qui se déroule dans les salons et les jardins du château. Le prince a réservé une surprise à sa chère Chloé. (à suivre...)