Résumé de la 78e partie n Pour extraire sa femme des cauchemars qu'elle fait depuis son enfance, Mike prévoit des vacances dans le Milwaukee. Je me souviens de la lumière particulière de cet endroit, songea Mike en étudiant avec un désarroi soudain la maison envahie par les ombres. Je me souviens de la fraîcheur de l'eau quand je plongeais dans le lac, de la chaleur du soleil sur mon visage, du vent qui gonflait les voiles du bateau qui filait. Juin finissait, mais on se serait cru au mois de mars. D'après la radio, une vague de froid avait envahi le Wisconsin pour trois jours. Pourvu qu'il y ait assez de charbon pour alimenter la chaudière, se dit Mike, sinon je résilie le contrat avec l'agence immobilière. Il devait réveiller Laurie. Pas question de la laisser seule dans la voiture, même pendant une minute. «Nous sommes arrivés, ma chérie», dit-il d'une voix faussement enjouée. Laurie remua. Il la sentit se raidir, puis se détendre en sentant ses bras autour d'elle. «Il fait si noir, murmura-t-elle. — Nous allons entrer dans la maison et allumer la lumière.» Il se souvint que la serrure avait toujours été délicate à manipuler. Il fallait tirer la porte vers soi avant d'insérer la clé dans le barillet. Il y avait une veilleuse branchée sur une prise dans la petite entrée. Il ne faisait pas chaud à l'intérieur mais la température était moins glaciale qu'il ne l'avait redouté. D'un geste rapide, Mike alluma la lumière dans l'entrée. Le papier mural, avec son motif de lierre grimpant, lui sembla décoloré et sale. La maison avait été louée pendant les cinq étés que sa grand-mère avait passés dans une maison de retraite. Mike se rappela combien elle était propre, claire et accueillante quand elle l'habitait. Le silence de Laurie l'inquiéta. L'entourant de son bras, il la conduisit dans la salle de séjour. Les sièges confortablement capitonnés dans lesquels il aimait se blottir avec un livre, étaient à la même place, mais, comme le papier peint, ils étaient sales et râpés. Des rides creusèrent le front de Mike. «Chérie, je suis navré. Venir ici n'était pas une bonne idée. Veux-tu que nous allions dormir à l'hôtel ? Nous sommes passés devant un ou deux motels sur la route qui m'ont paru corrects.» Laurie lui sourit. «Mike, j'ai envie de rester ici. Je veux partager avec toi tous les étés merveilleux que tu as passés dans cette maison. Comme si nous avions eu la même grand-mère. Peut-être alors pourrai-je surmonter ce qui m'arrive.» Laurie avait été élevée par sa grand-mère. Très névrosée, la vieille dame lui avait inculqué la peur du noir, la peur des étrangers, la peur des avions et des voitures, la peur des animaux. Lorsque Laurie avait rencontré Mike deux ans plus tôt, elle l'avait à la fois bouleversé et amusé en lui racontant une partie des histoires terrifiantes dont sa grand-mère l'avait abreuvée jour après jour. «Comment as-tu fait pour être aussi normale, aussi gaie ? lui demandait-il souvent. — Je n'allais quand même pas la laisser faire de moi une cinglée.» Mais les quatre derniers mois avaient prouvé que Laurie ne s'en était pas complètement sortie, que les dégâts sur le plan psychologique nécessitaient un traitement sérieux. (à suivre...)