Situation n Dans de nombreuses familles, le manque de communication est flagrant. Les parents entretiennent des relations superficielles avec leurs enfants. Ils ne communiquent avec eux que «quand ils ont besoin d'eux», souligne Mohammed Madani, enseignant de sociologie à l'Université d'Oran. «A vrai dire, les relations instrumentales constituent aujourd'hui la règle un peu partout dans le monde, on communique beaucoup plus par nécessité», poursuit-il. Selon lui, ce déficit de dialogue est dû à un «télescopage entre la tradition et la modernité». «Il y a là un conflit de générations, les parents et les enfants n'ont pas généralement les mêmes références et aspirations, ce qui n'est pas fait pour les rapprocher», explique-t-il. «Les parents et les enfants vivent dans deux mondes différents désormais en raison des changements intervenus au sein de la société avec l'avènement des nouvelles technologies de l'information et de la communication», indique, pour sa part, le président-directeur général de General computing Systems (Gecos), Younès Grar. Dans le même ordre d'idées, M. Madani relève que la société a beaucoup changé : «Si par le passé, le père exerçait une autorité que les enfants ne pouvaient contester, ce n'est plus le cas aujourd'hui. On est passé d'une extrémité à une autre sans pour autant que la communication s'améliore». Bien au contraire, les rapports se dégradent parfois au point que les parents ne savent même pas ce qui se passe dans la tête de leur progéniture. Sur ce registre, il n'est pas inutile de rappeler que les parents de l'auteur de l'attentat kamikaze qui a ciblé la caserne de Dellys, l'année dernière, n'avaient, à aucun moment, remarqué un changement de comportement chez leur enfant. Idem pour les familles des harragas qui, pour la plupart, affirment avoir été surpris par le comportement de leurs enfants. Ceci dénote une absence de communication que M. Grar qualifie d'«inévitable», en ce sens que «les enfants vivent dans un monde virtuel qui n'a rien à voir avec celui de leurs parents», dit-il. De l'avis de M. Madani, si le courant ne passe pas toujours entre les parents et les enfants de nos jours, «c'est aussi parce que les premiers n'ont pas le temps d'écouter les seconds en raison d'une vie de plus en plus difficile, ils travaillent du matin au soir et quand ils rentrent à la maison, ils sont tellement fatigués qu'ils ne pensent qu'à se reposer pour être en forme le lendemain». Last but not least, l'existence de sujets tabous dans la société comme la sexualité ne permet pas de rapprocher les deux parties. «Les parents ont peur d'aborder ce sujet au moment où leurs enfants éprouvent le besoin d'en parler, quand ils ne trouvent pas d'occasions pour le faire, ce qui est souvent le cas, ils commencent à penser à partir ailleurs, là où ils pensent pouvoir s'exprimer librement», conclut M. Madani.