Constat n La production du tapis traditionnel se heurte, aujourd'hui, à la concurrence des produits étrangers ainsi qu'au développement de l'industrie manufacturière nationale à grande échelle. La production de tapis, qui était à l'époque importante, soit 102 400 m2 en 1963, s'est effondrée pour se contenter du très modeste résultat de 309 m2, près de 25 ans plus tard en 1987. Ce sont les dernières estimations disponibles à la Chambre de l'artisanat, mais il n'y a pas de doute que la régression spectaculaire de l'activité s'est poursuivie au-delà de ces dates au point qu'un bon tapis de Tlemcen a pu être négocié récemment à 540 000 DA. Purs produits de la tapisserie traditionnelle, la h'sira (natte) et la zarbia (tapis) se font de plus en plus rares emportant avec elles des pans entiers d'un métier ancestral qui faisait la particularité et la fierté de cette ville d'art et d'histoire. Apanage exclusif d'une maind'œuvre féminine, la tapisserie artisanale a subi le même sort du fait, aussi, d'une régression drastique de l'approvisionnement en matières premières, et du redéploiement des apprentis de la tapisserie vers d'autres activités, particulièrement dans l'industrie et l'administration. Bien qu'ils aient à peu près les mêmes fonctions, les deux prototypes du patrimoine local, qui ont fait la réputation et la «griffe» artisanale de la région, diffèrent par le fait que la h'sira est assimilée au milieu rural et la zarbia à la ville. Tapis confectionné à partir de l'alfa, la h'sira a prospéré notamment au sud de la wilaya de Tlemcen et précisément dans la région montagneuse de Beni Snous où les habitants pérennisaient, malgré tout, ce métier dans lequel ils excellaient. El-Khemistia (Khemis), Achiria (Beni Achir) et Moussatia représentaient autant de types de h'sira que de hameaux situés autour de l'oued de Beni Snous où elles étaient confectionnées. La production de ces produits, qui a, aujourd'hui, beaucoup reculé, commence par la collecte de l'alfa, puis son traitement à l'eau et à la teinture avant de l'acheminer en grandes quantités vers les foyers où elle doit être transformée par les femmes. La confection de ce tapis traditionnel très prisé en milieu rural nécessite un travail laborieux et un savoir-faire engageant souvent deux femmes sinon plus. Une fois le produit fini, il est stocké avec le restant des tapis pour être proposé à la vente au marché hebdomadaire. Les spécialistes en patrimoine se souviennent qu'autrefois, les commerçants venaient de différentes régions du pays pour s'approvisionner en tapis ou h'siras de Beni Snous qui a gagné, au fil des années, une large notoriété et contribué à l'essor économique de ces contrées. On se rappelle aussi que le tapis de laine était très répandu dans les années 1960 et 1970 à Tlemcen et sa périphérie, avant de décliner à un point inimaginable. La seule wilaya de Tlemcen arrivait à exporter, en ces temps bénis, entre 350 000 et 450 000 m2 de tapis vers les marchés européens générant ainsi, outre des gains substantiels en devises fortes, près de 15 000 postes d'emploi direct, exclusivement féminins. Des centaines de postes d'emploi indirect ont pu être également créés dans le transport, le dépôt, la préparation et l'acheminement de la matière première.