L'Ours et le Renard étaient camarades. Un jour le Renard dit à l'Ours : — Viens, allons ensemble quelque part manger des raisins ! L'Ours répond : —Très bien, allons-y ! Les voilà partis, et peu après ils arrivent à la vigne de Edjinli Mehmet Agha. Ils entrent, et un grain par-ci, un grain par-là, le Renard commence à manger des raisins. Après en avoir mangé un peu, il s'enfonce un raisin dans une narine, un dans l'autre, et dit à l'Ours : — Camarade ! Je suis rassasié. J'en ai jusque-là (jusqu'au nez). Toi, n'es-tu pas encore rassasié ? Pourquoi restes-tu ? Allez, partons ! L'Ours répond : – Camarade ! Attends un peu, je ne suis pas encore rassasié. Nous partirons un peu plus tard, quand je n'aurai plus faim. Et se précipitant sur les pieds de vignes, il s'empiffre à qui mieux mieux, mangeant du raisin jusqu'à ce qu'il ait le ventre gonflé comme un tambour. Un peu plus loin, Mehmet Agha avait installé un piège sur le chemin qui traversait la vigne. L'Ours ayant déclaré qu'il n'avait plus faim, le Renard passe devant, l'Ours le suit. Arrivés près du piège, le Renard saute et passe, mais l'Ours met le pied en plein milieu et, comme son ventre est bien gonflé, il y reste coincé : — Camarade ! Comment venir ? On m'a attrapé ici. Viens me sortir de là ! — Comment veux-tu que je te sauve ? Edjinli Mehmet Agha arrive d'en bas avec son beau fusil, son coutelas et son gros chien trapu. S'il nous trouve maintenant ici, il va nous tuer tous les deux. Le Renard se tire de là, monte en haut de la vigne, et, couché contre une pierre, contemple ce qui se passe en bas. Mehmet Agha arrive, attrape l'Ours, et lui flanque une bonne correction. Se sauvant péniblement en criant Ouf ! Je n'en peux plus, je suis mort !» il arrive près du Renard : — Espèce de drôle, quel copain tu fais ? Il m'est arrivé un malheur, et tu ne m'as même pas aidé ! Le bonhomme m'a donné une bonne correction. Le Renard répond : — Eh, camarade ! Comment aurais-je pu te tirer de là ? Moi-même, j'ai eu beaucoup de mal à me sauver. Les voilà de nouveau partis ensemble. Au-delà de la vigne, ils arrivent à une plaine, et que voient-ils ? Un endroit magnifique. — Eh copain, viens, nous allons cultiver la terre ensemble ! dit le Renard — Eh, comment faire ? (à suivre...)