Critique n Les syndicats autonomes du secteur de l'Education nationale estiment que le ministère a préparé le terrain pour atteindre le taux de réussite enregistré, ajoutant que cela n'a aucun lien avec la réforme du système éducatif. Pour M. Boukhetta, du Conseil des lycées d'Algérie (CLA), la facilité des sujets, la délimitation des cours concernés par l'examen et les promesses du ministre aux élèves lors de leur grève constituent des indices révélateurs quant à la volonté du ministère d'enregistrer ce taux de réussite. «Jamais les sujets du baccalauréat n'ont été aussi faciles que ceux de cette année. On dirait qu'ils ont été conçus pour réaliser le taux le plus élevé possible de réussite», nous indique-t-il. La manière de désigner les leçons concernées par le bac est, selon lui, antipédagogique. «La confusion créée par la grève des élèves qui ont manifesté contre la charge insupportable des programmes a été reçue maladroitement par les responsables du secteur qui ont vite pris des engagements pour rassurer les candidats. Le ministre en personne a promis aux élèves que les sujets du bac seraient à leur portée, ce qui n'est pas du tout normal», explique encore notre interlocuteur. «La réforme n'a rien à voir avec les résultats. D'ailleurs, même les candidats du bac dit de réforme ne le sont pas réellement car ils n'ont suivi les nouveaux programmes qu'à partir de la première année secondaire. Même la méthode de conception des sujets n'obéit pas à la nouvelle approche adoptée dans le cadre des réformes. Les sujets ont été conçus selon l'approche par objectif, utilisée dans l'ancien système et non l'approche par compétence adoptée dans la réforme», précise M. Boukhetta. Notre interlocuteur appelle le ministère à mettre un terme à «cette course derrière les résultats» car, dit-il, «l'Algérie ne va pas disparaître dans cinq ans et les fruits des réformes seront cueillis à long terme». Par ailleurs, le porte-parole du Cla estime que «la manipulation intelligente des résultats» ne servira personne, appelant à faire participer l'ensemble des acteurs pour «corriger cette réforme». Le Snapest est aussi du même avis. Mme Meriem Maârouf, membre de ce syndicat autonome, affirme que «les résultats du baccalauréat 2008 ont été confectionnés d'avance et ne renseignent nullement sur le niveau réel des élèves». En sa qualité d'enseignante de philosophie, elle atteste que «des élèves ont réussi au baccalauréat et avec mention, alors qu'ils sont très défaillants et dans la plupart des matières pour ne pas dire toutes, car je suis aussi chef de classe et je suis censée faire le suivi de l'ensemble des notes obtenues. Aussi est-il concevable de donner une note de 18/20 en philosophie ?». La réforme ne doit jamais être synonyme, soutient-elle, de faire passer tout le monde à l'université. «Le ministère a envoyé des instructions aux enseignants de dispenser certains cours obligatoirement. Les enseignants qui ont préféré s'en passer, ont été contraints de convoquer les élèves durant les vacances à cet effet. C'était flagrant et effectivement ces leçons ont été le sujet du bac», révèle encore la syndicaliste.