Imaginaire n Si le regard est fasciné par tant d'objets et de formes, il est néanmoins captivé par les motifs calligraphiés. Une exposition de l'artiste Rachid Koraïchi, organisée en hommage à Djallal Eddine El Roumi, l'une des figures les plus éminentes du soufisme, se tient à la Citadelle d'Alger (Bab edjdid). Ayant pour titre «Chemin des roses», l'exposition comprend des objets en poterie des vasques en porcelaine, des coupes évasées et peu profondes, et sur chacune d'elles sont inscrites des représentations calligraphiées. Des effluves parfumés s'épanchent des pétales flottant dans les récipients. En plus, les murs de la salle sont recouverts de tissages rectangulaires bleus, précieusement et excellemment brodés d'or et subtilement éclairés de manière à créer un effet visuel spectaculaire – et une atmosphère génératrice de sentiments intimes et d'impressions fantasmatiques. Cet effet optique confère aux motifs représentés sur ces tentures translucides un volume consistant et apparent ainsi qu'un relief discret et en même temps éclatant – le regard peut percevoir ce rapport existant dans la culture et tradition arabo-musulmane entre le vu et le non-vu, le voilement et le dévoilement. Si le regard est fasciné par tant d'objets et de formes, il est néanmoins captivé – et inlassablement capturé – par les motifs calligraphiés et sur lesquels il s'attarde longuement. De belles inscriptions, épurées et appliquées, fines et délicates, recherchées et élaborées, imaginatives et poétisées. Toutes sont bellement inspirées et avec imagination de la calligraphie arabe, cet art de dire l'alphabet en beauté et en raffinement et en sensualité. Rachid Koraïchi procède effectivement de la même manière qu'un calligraphe, ce procédé qui consiste à former et à recomposer les caractères de l'écriture. Il ne s'agit cependant pas de reproduire fidèlement et intégralement l'alphabet arabe – ce n'est d'ailleurs pas son souci ni même son principal centre d'intérêt – mais de s'en inspirer pour en insuffler une autre qui, d'apparence, rappelle manifestement l'héritage culturel – et scriptural – arabe. Sa démarche consiste alors à développer un geste créatif, ce même geste que l'on retrouve dans toutes ses créations et tout au long de sa réflexion sur l'art de la calligraphie arabe, à savoir celui d'assembler à l'aide de tracés composés et de parcours enchevêtrés une combinaison inspirée de signes qui, eux, se veulent imaginatifs. Ces représentations scripturales à caractère symbolique mais descriptives sont manifestement à vocation artistique. Elles ont une fonction relevant d'un besoin de dire une esthétique : elles confèrent ainsi à la création une poétique par laquelle Rachid Koraïchi, se distingue.