Parade n Face à une sécheresse endémique qui remonte de l'Afrique subsaharienne et face surtout à l'absence d'une politique claire de gestion de l'eau, nos fellahs n'ont d'autre choix que la débrouille. Le système D. Le process est connu et galvaudé : prendre ce qu'on n'a pas, là où il se trouve, c'est-à-dire pirater purement et simplement les conduites d'eau. Des milliers de paysans et de propriétaires ont eu ainsi recours à ce genre de passe-passe. Grâce à des branchements illicites sous forme de bretelles, ils ont pu arroser à loisir leurs maigres lopins. Et gratuitement par-dessus le marché. Cela évidemment n'a pas été sans conséquence sur l'alimentation des riverains en aval de ces piquages et qui ont vu leur quota dangereusement perturbé. A titre d'illustration, nous citerons l'exemple de ce «piratage» célèbre opéré dans les années 70 par les habitants de la banlieue de Saïda… sur la conduite même de Saïda. Les veinards, pendant des années, ils se lavaient, se douchaient, faisaient leur vaisselle et leur lessive avec de l'eau thermale qui ne leur a pas coûté un kopeck… Un autre piratage est actuellement en vogue dans nos campagnes et connaît beaucoup de succès : le forage illicite de puits que nous devons à des puisatiers syriens sans papiers. Une question vient tout de suite à l'esprit : pourquoi est-il interdit de creuser un puits ? La réponse tombe sous le sens : pour éviter la surexploitation de la nappe phréatique déjà très mal en point. Une police, la police des eaux, a même vu le jour et fait la chasse systématique à ce type de comportement qui, à terme, empêche la nappe de se régénérer. Et apparemment, les périmètres de protection de ces sites sensibles et ultra protégés ne découragent presque plus personne. Et enfin nous arrivons à la dernière série en matière de piratage : l'irrigation des cultures par des eaux usées et non apurées. Une soixantaine d'exploitants agricoles dans la wilaya de Sidi Bel Abbes qui ont eu recours à ces pratiques viennent d'être dénombrés et identifiés par les services de l'hydraulique. Selon le rapport de la police des eaux, des centaines d'hectares cachés par le relief et presque indétectables auraient été copieusement arrosés par ce «poison». Ces contrevenants sévissaient en fait, le long de l'oued Mekerra, entre les communes de Sidi Brahim et Moudjebha. Les parcelles incriminées étaient soigneusement dissimulées entre les berges du cours et, de ce fait, étaient soumises à des cultures grandes consommatrices d'eau comme les melons, les pastèques et autres crudités. Indépendamment des problèmes de santé publique que ces pratiques délictuelles posent et qui sont punies par la loi, la police des eaux a procédé à des mesures conservatrices, en attendant que la justice prenne le relais : la confiscation du matériel de pompage et la destruction des terrains incriminés. Enfin, nous noterons dans ce chapitre que dans certaines régions du Hodna, les fruits mêmes sont piratés de manière invraisemblable, les pastèques en particulier. Pour être certains que leur qualité est impeccable et que le consommateur trouve dans son assiette une pastèque rouge vive et sucrée, des fellahs ont eu l'idée de les piquer à l'aide de seringues… remplies de sirop. Ainsi la saveur est assurée et la couleur aussi…