Il était ce qu'il en était. — Que l'abondance et la paix soient sur toi ! — Notre chambre est en soie, votre chambre est en lin et la chambre de l'ennemi est un nid de souris. Messieurs et nobles Seigneurs, que nous soyons guidés, que vous soyez guidés sur la voie du bien et de la foi. Il était un roi qui avait quarante garçons et qui s'était juré de les marier à quarante sœurs nées, elles aussi, d'un même père et d'une même mère. Il appela un jour son plus jeune fils, M'hammed, lui demanda d'aller voir un certain sultan car il avait les quarante filles rêvées et de les demander en mariage. Le lendemain, M'hammed le fils du sultan prépara des vivres et des armes puis partit. Il peupla un pays et en vida un autre jusqu'à ce qu'il atteignît le pays indiqué par son père le sultan. Il arriva au palais, demanda à être présenté au roi et s'adressa à lui en ces termes : — Nous sommes quarante garçons d'un même père et d'une même mère. Mon père le sultan m'a envoyé chez vous parce qu'il sait que vous avez quarante filles d'une même mère et d'un même père et il vous demande leurs mains pour nous. Le roi lui dit qu'il avait lui-même juré de ne marier ses filles qu'à quarante frères nés d'une même mère et d'un même père et que ce mariage l'arrangeait parfaitement, mais il lui avoua qu'il avait peur de ses voisins et de ses sujets qui avaient menacé de l'attaquer s'il mariait ses filles à des étrangers. M'hammed le rassura en lui disant qu'il se chargerait lui et ses frères de le protéger contre toute attaque. Le roi se détendit alors et lui dit : — Maintenant, rentre chez toi, va chercher tes frères et nous fêterons les mariages ici. M'hammed le fils du sultan rentra, annonça la bonne nouvelle puis, accompagné de ses frères, se rendit chez le roi, père des quarante filles. Le mariage fut grandiose : dura sept jours, sept nuits et sept jours encore. Quelque temps après, M'hammed le fils du sultan déclara : — Nous devons partir à présent et emmener nos femmes. Le roi s'en attrista et répéta sa peur d'être attaqué, le prince lui affirma que personne ne l'attaquerait plus et partit avec frères et femmes. Dès qu'ils quittèrent la ville, le cheval de la plus jeune princesse, la femme de M'hammed le fils du sultan, s'arrêta net et refusa d'avancer. La princesse appela alors son mari et lui dit qu'il était arrivé malheur à son père. M'hammed le fils du sultan lui demanda de ne pas s'inquiéter, de poursuivre son chemin avec les autres ; lui seul retournerait chez le roi voir ce qu'il en était. M'hammed le fils du sultan trouva son beau-père attaqué par ses sujets et ses voisins, il tira son épée et commença à les massacrer sans pitié. Il en tua un grand nombre et les autres s'enfuirent. Il resta encore quelques jours avec son beau-père, le temps que l'ordre fût rétabli, puis reprit le chemin du retour. En route, là où devaient se trouver ses frères et les princesses, il n'aperçut que de grands blocs de pierres alignés. Il en fut inquiet et, voyant un berger non loin de là, il se dirigea vers lui et lui demanda d'où venaient tous ces rochers qui encombraient le chemin et qui n'existaient pas auparavant. Le berger lui répondit : — Ce sont les quarante princesses du sultan de ce pays qui se sont mariées à quarante princes du sultan d'un autre royaume et qui partaient chez leurs époux. Le cortège était si grand qu'il avait caché le soleil un long moment et l'ogre, mon maître, en a été tellement furieux qu'il a soufflé sur tout le monde et les a transformés en pierres.