Expression n Les photographies de Abdelkhalek Labbize renvoient à une Algérie diverse, belle, et illustrent des instants rares, uniques et spontanés. Ce sont de purs moments d'émerveillement auxquels ont droit les internautes qui visitent son site «Couleurs d'Algérie» et ils sont nombreux. InfoSoir : Pourquoi un site de photos consacré à l'Algérie ? Abdelkhalek Labbize : J'ai simplement voulu rappeler aux miens qu'il existe des endroits et des paysages fabuleux, vierges. Je voulais également attirer l'attention sur la nécessité de préserver ces sites. Une certaine sinistrose s'est emparée de nos concitoyens depuis plusieurs années. La plupart des algériens croient qu'il n'y a rien de beau ou rien d'intéressant en Algérie, que le «Paradis est ailleurs» et que «l'herbe est plus verte chez nos voisins». Comment l'idée vous est-elle venue de créer ce site ? Avec la démocratisation de la photo numérique, il est devenu plus aisé de faire de la photo ; certaines contraintes disparaissaient. Je m'y suis, donc, mis. Au départ, je photographiais essentiellement Alger, puis, au fil de mes voyages, d'autres régions d'Algérie. Il y a encore quelques années, une recherche de photos d'Algérie sur Internet ne faisait apparaître que des photos en noir et blanc, des photos de nostalgie, des photos d'avant l'Indépendance... Je voulais montrer que l'Algérie ne s'était pas arrêtée en 1962. J'ai, donc, décidé de montrer une Algérie en couleurs, d'où le nom du site «Couleurs d'Algérie». Je commençais à envoyer quelques photos à des parents et amis vivant en dehors de l'Algérie. Leurs encouragements et leur quête d'autres photos m'ont incité à créer un site web. Depuis 2004, près de 700 000 visites à mon site (provenant de plus de 85 pays) avec des pics de 7 000 visiteurs par jour m'encouragent à continuer. Pour ce qui vous concerne, faire de la photo est-ce une passion, un métier ou un acte de création ? Il s'agit d'une passion. J'ai d'autres activités professionnelles. Je ne peux, en aucun cas, parler de création. Je suis juste un témoin de ce que je vois. Je n'ai pas la prétention d'être un artiste et je ne cherche pas à faire des photos artistiques propres à plaire à une «élite». Que représente pour vous la photographie ? Une façon de chercher à mieux découvrir et connaître mon pays. Lorsque je souhaite visiter tel ou tel endroit, la photo est une espèce de motivation pour ne pas hésiter à y aller. Certains me reprochent de montrer une Algérie photogénique. Je réponds simplement que je ne suis pas un reporter qui aurait pour mission d'attirer l'attention sur ce qui ne va pas ; beaucoup le font mieux que moi… Et puis quel mal y a-t-il à se raser, à se «pomponner» avant de se faire tirer le portrait ! ! ! Ce qu'il faut savoir c'est je ne procède jamais à des retouches de nature à altérer la réalité. Les sites ou les paysages que je photographie sont bien réels. Après un site, avez-vous l'idée de faire un livre-album ? Je souhaite, bien entendu, pouvoir publier un livre. Je suis à la recherche d'un auteur qui souhaiterait participer à la partie rédaction. Et, bien entendu, un éditeur. Jusqu'à présent, quelques-unes de mes photos ont été publiées dans des manuels scolaires (algérien, marocain et libanais). Certains postes consulaires algériens utilisent mes photos pour illustrer l'Algérie. Sans parler de sites web spécialisés ou généralistes. Comment procédez-vous aux prises de vue ? A quel moment de la journée, les effectuez-vous ? «La photographie est une brève complicité entre la prévoyance et le hasard.» a dit John Stuart Mill. C'est simple, quand un endroit me plaît, je le ‘'shoote''. D'une manière générale, j'évite de prendre en photos les gens (certains internautes me le reprochent d'ailleurs). Ceci parce que, d'une part il faut demander l'autorisation (ce qui obligera les gens à ‘'poser'' ce qui réduit fortement la spontanéité) et d'autre part pour éviter tous problèmes d'atteinte aux droits à l'image… L'Algérie est un pays de lumière. J'évite, donc, les moments d'ensoleillement maximum. Mes moments préférés, comme pour tous les photographes, sont l'aube, le matin, puis les fins d'après-midi. Est-ce qu'il y a un choix des sites photographiés ou cela se fait-il instinctivement, sur un coup de cœur ? C'est essentiellement des coups de cœur. Et Dieu sait qu'il y a des paysages ou des sites à couper le souffle.