Désagréments n Depuis le début du ramadan, les habitants de Bab El-Oued, ainsi que les visiteurs, assistent, impuissants, à des scènes désolantes. Au marché des Trois-Horloges, les querelles éclatent parfois très tôt le matin, avant même l'installation des étals. «Ici tag ala man tag. Gare à celui qui baisse sa vigilance. Il faut s'imposer durant ce mois car les places sont rares et les gens viennent d'un peu partout pour vendre leur marchandise. Si on n'est pas virulent, fort et dissuasif, il vaut mieux aller vendre sa marchandise ailleurs», explique Redouane, 19 ans, venu de la Casbah avec son petit frère de 12 ans vendre les diouls préparés par leur mère. «Nous sommes 9 à la maison. Avant, je tenais une table de cigarettes, mais comme c'est le ramadan et les diouls marchent très bien surtout dans ce marché, j'ai préféré y venir», explique le jeune homme qui dit arriver sur les lieux de bonne heure pour pouvoir occuper une place. Pour lui, tout dépassement de ses voisins, signifie la bagarre. «Je ne reconnais l'autorité ni la priorité de personne. La règle ici c'est ‘'premier arrivé, premier servi''. Et si vous voulez qu'on vous laisse en paix, il faut user souvent de vos poings…», dit-il. Selon le commissaire Metlef, une dizaine de bagarres éclatent chaque après-midi au marché. Souvent entre les vendeurs ou entre un vendeur et un client. Selon lui, sous l'effet du jeûne, les vendeurs, des jeunes pour la plupart, essayent de trouver le moindre prétexte pour s'accrocher avec leurs voisins ou passants. «Pousse-toi un peu, tu me gênes avec ta marchandise», ou «pourquoi tu as pris ma place, j'étais ici hier» sont autant d'étincelle pour de violentes bagarres. Les commerçants déclarés n'hésitent pas à les qualifier de «voyous» qui ne sont pas là pour vendre, mais surtout pour déranger les autres … Lors de notre virée au marché, nous avons assisté de visu à de nombreuses querelles qui se sont soldées par des bagarres violentes où sont utilisées, souvent, des armes blanches. Comme cette bagarre généralisée qui a eu lieu le 14 septembre vers 15 heures. Ayant entendu des cris et des injures, nous nous sommes approchés pour constater qu'il ne s'agissait pas de deux adolescents en train de se battre à coups de poing, mais d'une bagarre générale entre des vendeurs. Plusieurs jeunes ont pris part à ce combat d'une rare violence. C'est la pagaille. Des cageots de fruits et légumes sont heurtés et renversés par ces «cow-boys» du XXIe siècle. Des dizaines de curieux suivent, amusés, la scène mais sans oser la moindre intervention. Nous avons appris par la suite que tout a commencé par une bagarre entre deux vendeurs qui ont fait appel par la suite à des amis et des «ouleds el-houma». Même la police a eu du mal à mettre un terme à cette bataille rangée qui a bloqué, plus d'une heure durant, l'activité du marché. Le commissaire Metlef nous apprendra plus tard que des scènes semblables sont très fréquentes dans ce marché depuis le début du ramadan.