Progrès n Même si la médecine légale est née au XIXe siècle, les médecins se sont toujours intéressés aux causes des décès et, dans certains cas même, à identifier les criminels. On sait que la criminologie – on dit criminalistique – qui se consacre à la découverte du fait judiciaire et à l'identification de son auteur, s'appuie sur plusieurs sciences et techniques. Nous avons longuement parlé de la découverte des empreintes digitales et de leur rôle dans l'identification des cadavres et surtout des criminels, il reste encore à parler des autres prouesses de la criminologie, comme l'étude des cadavres, l'étude des traces humaines : les cheveux, les gouttes de sang, le sperme… Dans cette série, nous nous intéresserons surtout à l'étude des cadavres, à leur identification, quand ils sont méconnaissables, et à la recherche des causes de la mort. C'est à la médecine et ses différentes branches – anatomie, chirurgie, hématologie, traumatologie, toxicologie, etc. – que la criminologie, dans ce domaine, emprunte ses techniques. C'est la médecine légale, autrefois science méprisée, mais qui a montré son rôle dans la recherche des causes de la mort et l'arrestation des coupables. Aujourd'hui, il existe, dans toutes les universités du monde, des chaires de médecine légale et certains chercheurs sont aujourd'hui célèbres. Comme pour la série précédente, nous évoquerons pour nos lecteurs les affaires célèbres, en soulignant à chaque fois les prouesses. Même si la médecine légale est née au XIXe siècle, les médecins se sont toujours intéressés aux causes des décès et, dans certains cas même, à identifier les criminels. Les médecins grecs s'intéressaient beaucoup à l'anatomie et à la dissection et avaient réussi à identifier les organes vitaux. On cite aussi ce médecin romain, Antistius, qui après l'assassinat de Jules César, avait disséqué son corps. Il pensait que des 23 coups de couteau qu'il avait reçus, un seul était mortel. C'est celui qui lui avait transpercé la poitrine et atteint le cœur. Les médecins arabes, qui s'étaient inspirés des médecins grecs, mais qui les ont largement dépassés, ont étudié le corps humain, les blessures susceptibles d'entraîner la mort, les effets du poison, etc. On attribue à Michel Servet la découverte de la petite circulation du sang, entre le cœur et les poumons, mais en réalité, cette découverte a été faite par un médecin musulman, Ibn Nafis (XIIIe siècle de l'ère chrétienne). Il a fallu attendre le début du XXe siècle pour qu'un jeune étudiant égyptien, Muh'yi' dîn al-Tatawî, démontre, dans une thèse soutenue à Fribourg, en Allemagne, que Servet s'était inspiré de Ibn Nâfîs. On sait, aujourd'hui, que Michel Servet – qui lisait bien l'arabe – s'est beaucoup inspiré des maîtres musulmans. Il s'est inspiré, non seulement des œuvres scientifiques, mais aussi des œuvres théologiques très proches de celles des musulmans, comme la négation de la trinité (dogme chrétien, qui divise la divinité en trois personnes, le Père, le Fils et le Saint-Esprit) lui vaudra une condamnation de l'Eglise qui le brûlera vif ! C'est au siècle d'Ibn Nafis, le XIIIe, que le premier ouvrage de médecine légale a été écrit. Comme les empreintes digitales, il vient de Chine. C'est le fameux Hsi Yuan Lu qui utilise les connaissances médicales pour traquer les criminels. On y trouve, au milieu d'un fatras de passages fantaisistes, des considérations sur l'autopsie des cadavres, la nature des blessures, les armes utilisées, tranchantes ou contondantes, les signes de la noyade, etc. Déjà, on trouve, dans ce livre, la différence entre ceux qui sont morts par noyade et ceux qui ont d'abord été tués avant d'être immergés. (à suivre...)