Pour faire face aux défis de plus en plus grands que posent la criminalité et l'application de la loi, la gendarmerie nationale a engagé un vaste programme de modernisation de ses moyens d'investigation à travers, notamment la mise en place de l'Institut national de criminalistique et de criminologie. Sa mission s'articule autour de deux objectifs : le service public et les tâches de recherche se rapportant les unes et les autres tantôt à la criminalistique, tantôt à la criminologie. L'institut est chargé de réaliser, à la demande des magistrats, des expertises et des examens scientifiques, dans le cadre des enquêtes préliminaires et des informations judiciaires en vue d'établir les preuves permettant d'identifier les auteurs des crimes et délits. Tout en assurant une assistance scientifique aux investigations complexes, il participe aux études et analyses relatives à la prévention et à la réduction de toute forme de criminalité. Sa mission consiste également à concevoir et réaliser des banques de données conformément à la loi, y compris celle des empreintes génétiques qui seront mises à la disposition des enquêteurs et des magistrats en vue de l'établissement des rapprochements et liens éventuels entre les délinquants et les modes d'actions criminelles. D'autres actions comme celles de participer à la définition d'une meilleure politique de lutte contre la criminalité, d'initier et de mener des travaux de recherche ayant trait à la criminalité en recourant à des technologies de pointe, d'assurer le développement de la recherche appliquée et des méthodes d'investigation ayant été jugées efficaces dans le domaine de la criminologie et de la criminalistique sur le plan national et international, sont également inscrites dans son programme. Il faut savoir que cet institut est composé de deux importantes structures : la direction criminalistique qui regroupe 12 départements (empreintes digitales, balistique, examens de véhicules, expertise de documents, micro-analyse, micro-informatique, environnement, incendie, explosion, biologie, toxicologie, anthropologie et odontologie médico-légale, entomologie) et la direction criminologie (criminologie générale qui étudie les facteurs sociaux, la constitution psychologie et la criminologie spécialisée qui prend en charge l'état de la criminalité économique et financière, les diverses activités criminelles pratiquées dans les opérations informatiques ainsi que les comportements criminels). Ibis, N-Afis-A : l'efficacité de deux systèmes Si le siège de l'INCC/GN est encore en chantier à Bouchaoui, le personnel affecté à l'établissement ne chôme pas. Relevant actuellement de la direction des projets de la gendarmerie nationale, dirigée par le colonel Smaïl Hellab, l'institut dispose d'une partie de ses laboratoires au niveau du siège du commandement à Chéraga. C'est là que sont installés les deux systèmes d'identification, l'un lié à la balistique (Ibis) et l'autre à l'empreinte digitale (Afis). L'acquisition qui consiste à extraire les traces microscopiques sachant que pour l'homme, chaque arme a une empreinte spécifique, et l'analyse qui fournit les résultats. Concernant la partie non criminelle (armes appartenant aux citoyens, GLD, Patriotes, etc.), 135 140 armes à feu et 184 402 douilles ont été identifiées depuis la création de la cellule. Pour la même période, 89 affaires (suicides, homicides) ont été élucidées et 70 armes identifiées. La fiabilité des résultats est de 99% pour les empreintes digitales et 85% pour les palmaires. Il existe 238 live scan desservant 48 groupements et 11 stations mobiles (en cas de catastrophe naturelle). Les tribunaux de chefs-lieux sont également reliés à ces stations. La capitale dispose à elle seule de sept stations en plus de celle reliée au groupement de wilaya, soit un total de 8 stations. Dans la salle des opérations, nos guides officiers nous ont fait part, à titre d'exemple, de deux affaires traitées et élucidées. Soucieux de doter les différentes structures de l'INCC, le commandement de la gendarmerie nationale a envoyé des dizaines d'officiers en formation à l'étranger (130 formés ou en cours de formation). En avril dernier, 39 officiers sont rentrés de Grande-Bretagne avec un diplôme de mastère spécialisé dans les sciences légales, la visualisation accidentologie, l'ingeniering, l'ADN, le sang, la toxicologie, la balistique, la drogue, l'incendie, l'environnement, les documents, la fraude, le crime organisé, le blanchiment d'argent et la méthode de recherche. Formé chez Scotland Yard et plus exactement à l'université de Teeside, le commandant Sid-Ahmed Bouremana, major de promotion, est spécialiste dans l'application des sciences dans la médecine légale ; “une goutte de sang, un cheveu peut nous aider sur le théâtre d'un crime et s'avérer déterminant pour la suite de l'enquête”, dit-il. À temps partiel, le commandant Bouremana et ses collègues regagneront la Grande-Bretagne pour préparer des PHD. Pour sa part, le responsable de la communication, le colonel Abderrahmane Ayoub, dira que “du côté du commandement de la gendarmerie nationale, on a vite compris qu'il fallait être prêt à relever les défis constitués par une progression et une diversité plus grande de la criminalité sous toutes ses formes. Le trafic des stupéfiants, la contrebande, les réseaux de passeurs d'immigrés clandestins, la contrefaçon, la fausse monnaie, le trafic d'armes et de véhicules, mais aussi le blanchiment d'argent sont autant de formes identifiées du crime organisé. Face à cette criminalité de plus en plus active, en relation parfois avec les réseaux transnationaux, la gendarmerie nationale n'est pas restée inactive. La recherche de la preuve passe aujourd'hui par la découverte d'indices qui peuvent confondre scientifiquement un suspect. L'aveu doit être banni par la police judiciaire. D'ailleurs, souvent des délinquants ont déclaré au juge que les aveux leur ont été extorqués par la force. Les technologies biométriques ont été particulièrement ciblées : le corps humain est devenu une source d'informations de premier ordre. ALI FARES