Publication n Ce que le jour doit à la nuit est le dernier roman de Yasmina Khadra. D'abord paru aux éditions Julliard, en cette année 2008, puis réédité, en Algérie, par les éditions Sédia, le roman, de plus de cinq cents pages, est une saga qui s'étale sur plusieurs décennies, du XXe siècle, allant des années 1930 jusqu'à 1962, date de l'indépendance de l'Algérie. L'histoire se déroule dans l'ouest algérien au temps de la colonisation, d'abord à Oran, ensuite à Rio Salado, un village colonial, pas loin d'Oran. C'est l'histoire de Younes, Jonas pour les français, qui, très jeune, voit, un jour, sa vie basculer d'un monde à l'autre. Son père, acculé par la misère, se trouve contraint d'abandonner son unique fils, à son frère, Mahi, qui, ayant fait des études poussées, jouit d'une situation sociale aisée, contrairement à la majorité des Algériens qui spoliés jusque dans leurs propres droits et liberté, croulent sous le poids de l'indigence et de l'infortune. Younes, devenu Jonas, a de la chance. Il grandit et évolue au sein de la communauté européenne. Dans sa nouvelle vie Jonas fait connaissance de Simon (juif), de Fabrice et de Jean-Christophe (chrétiens). Tous les quatre deviennent très proches, les meilleurs amis. Tous les quatre, proches et complices, cultivent une amitié solide et fidèle. Mais l'entrée d'Emilie, dans leur vie, perturbe cette amitié partagée. Il y a aussi la guerre de libération nationale, la Révolution de 1954, qui a bouleversé la donne. Leur relation, alors qu'elle était forte et édifiante, commence, peu à peu, et au fil des évènements qui se succèdent et se précipitent, à s'étioler, jusqu'au jour où tout a éclaté : à l'indépendance de l'Algérie, chacun est parti de son côté, tentant chacun de se réinventer ailleurs, autrement. Ce que le jour doit à la nuit est un roman qui, traversant une génération d'Algériens, raconte un pan de l'histoire de l'Algérie, cette autre histoire que tout un chacun ignore, celle où se mêlent des histoires d'amours et d'amitiés entre musulmans, chrétiens et juifs, entre Algériens autochtones et Algériens d'origine européenne. Ce roman – un hymne à l'amour – montre que le rapprochement et la cohabitation entre les différentes communautés auraient été possibles si, toutefois, les uns avaient fait preuve de sagesse et de modestie, et si les autres avaient fait don de pardon et de mansuétude. Mais ni les uns ni les autres, alors qu'ils étaient côte à côte, n'ont su ni se rapprocher ni s'aimer ; les uns étaient animés par le mépris, le repli sur soi et la suffisance, et les autres étaient nourris de haine, de rancune et de vengeance. Cela a abouti – le sort en était jeté – à la séparation dans la douleur et la tourmente. Le roman révèle enfin que l'Algérie, au lendemain de l'indépendance, s'est amputé de sa moitié, et que la communauté algérienne d'origine européenne a perdu, en terre d'Algérie, une part de son existence, de son histoire, de sa mémoire. Ce que le jour doit à la nuit est une leçon d'amour et d'amitié, de pardon et de tolérance, de respect et de rapprochement, une leçon que tout un chacun doit porter sur soi, dans son cœur comme dans ses pensées.Une leçon que nous devons apprendre pour traverser le présent et aller vers l'avenir, pour construire un monde commun à tous.