Ecriture n La peinture de Cherbal Seïf El-Islam, tout comme sa poésie, est un lieu d'expression, habité par un langage : la parole. Si devant la justice et au cours d'une plaidoirie, Cherbal Seïf El-Islam se réfère à un type de langage, il choisit avec une fine habileté un registre de vocabulaires approprié au contexte judiciaire et compose adroitement ses mots qu'il place subtilement dans un discours parlant et persuasif, s'il opte pour une élocution verbale éloquente et inspirée, donc recherchée et créative, il en fait de même pour l'art, à savoir l'écriture et la peinture. Sa poésie est un espace où se construit un assortiment de mots, des mots choisis et par lesquels se dit une pensée, une sensibilité ; c'est un espace du dit, celui de la parole, où s'organise et s'édifie l'idéal poétique qui, lui, se révèle dans une incarnation symbolique. Sa peinture, tout comme sa poésie, est un lieu d'expression, habité par un langage, la parole, sauf que celle-ci est illustrée par les formes – toute sorte de matériaux de récupération composent son univers où le rêve va à la rencontre de la pensée intellectuelle, allant des fragments en bois aux éclats de verre en passant tantôt par des bouts de ficelle en laine, tantôt par des coupures de papier, et tantôt par d'autres matières comme les fils électriques ou les chaînes en métal – et par les couleurs; c'est une peinture de l'imaginaire composé – «J'utilise tous les matériaux, tout ce qui me tombe sous la main», explique l'artiste, et s'exprimant sur sa peinture, ce dernier dit : «je fais du surréalisme». Cherbal Seïf El-Islam recourt effectivement à une expression franche et impulsive, naturelle, sincère et instinctive, et qui vise à affranchir l'esprit des contraintes du monde visible, celles qui stéréotypent la création, et à privilégier la représentation mentale et psychique ; sa peinture est celle du jaillissement et de l'instantané ; il y a explosion des couleurs et éruption des formes ; c'est une peinture aussi du mouvement : tout est vie et énergie. L'imaginaire pictural de Cherbal Seïf El-Islam est le prolongement de l'écriture, puisque ce qui est dit en mots, l'est en peinture. Les thèmes évoqués dans sa poésie – tels que la liberté d'expression, le combat pour les libertés individuelles et les droits de l'homme, ou pour la souveraineté des peuples opprimés, autant de thèmes se constituant en des plaidoiries pour tout homme aspirant à la dignité et au respect – sont également abordés dans sa peinture dans un symbolisme manifestement démonstratif et nettement suggestif. Si dans un poème, Cherbal Seïf El-Islam parle de Benjamin Moloise, ce poète sud-africain qui, dans ses poèmes, dénonçait, à l'époque, l'apartheid, et qu'il intitule A Benjamin Moloise, il réalise une peinture dans laquelle il raconte ce poète du refus et de l'abnégation, un poète humain, contestataire et réfractaire. Le composé de ce tableau est constitué de bouts de papier, c'est-à-dire l'artiste recourt à la technique du collage et de l'assemblage de coupures de journaux, toutes renvoyant à ses positions politiques et à son engagement artistique.