Chiffre n Selon la Gendarmerie nationale, 80 000 avortements sont recensés chaque année. Le nombre d'enfants nés hors mariage (environ 3 000 par an) devrait attirer l'attention des hautes autorités. Selon le ministre de la Solidarité nationale, il a été enregistré, en 2007, pas moins de 2 887 enfants abandonnés. Ces chiffres, bien entendu, ne sont que la face visible de ce phénomène, et il y a donc lieu de s'interroger sur les avortements pratiqués clandestinement et sur le sort réservé aux enfants qui naissent hors mariage. Il faut dire que la passivité et le désengagement des parents, la pauvreté, l'analphabétisme, etc., sont des facteurs à l'origine de la dégradations des mœurs dans notre pays, causant une hausse vertigineuse du nombre d'agressions sexuelles, de cas d'incestes et de prostitution. D'où l'augmentation du nombre d'avortements. Karima, la trentaine environ, parle du sujet : « Moi, je crois que le viol dans le sens le plus vrai, c'est-à-dire celui qui est commis de force, est rare chez nous. Peut-on considérer comme des victimes de viol ces jeunes filles entre 15 et 18 ans qui agissent en toute liberté et qui n'en font qu'à leur tête ? Non, elles ont une part de responsabilité, elles et leurs parents.» Une assistante médicale rencontrée dans un hôpital d'Alger, nous raconte l'histoire d'une femme qui a concouru à l'avortement de 15 jeunes filles avec la complicité de sa fille. La justice a condamné les deux criminelles à 10 ans de prison ferme et à une amende de 200 000 DA. C'est dire combien la loi ne badine pas avec ce genre de crime. Rencontrée dans un cabinet privé de gynécologie, Badia, psychologue, ne cache pas sa désolation et sa colère à l'égard des médecins qui foulent aux pieds la loi, l'éthique et la religion et s'impliquent dans ce genre de pratique : «Un médecin a exigé 30 000 DA contre l'interruption de la grossesse d'une jeune fille qui avait eu une relation incestueuse avec son père et c'est la mère de cette fille qui a déposé plainte contre son mari coupable d'inceste, l'accusant d'avoir ruiné la vie de sa fille et la sienne.» «Je pense qu'il faut briser le tabou, l'avortement est devenu un véritable phénomène de société et nos officiels doivent être conscients du nombre d'abandons liés à l'avortement», ajoute-t-elle. «Il est toujours douloureux de voir un enfant abandonné. Il y a ceux que l'on retrouve vivants, d'autres morts. Combien sont-ils, en fait, à mourir dans l'anonymat ?», s'interroge un enseignant universitaire. Enfin, il y a lieu de signaler que des témoignages indiquent que l'avortement provoqué coûte entre 70 000 et 90 000 DA.