La dernière conférence que Mustapha Boughaba, président de l?association du Chahid Ali-Dahmane de Tipaza et ex-responsable de l?ONM, devait tenir à Alger, a été empêchée par les autorités locales. Dans l?entretien qu?il nous accorde, cet ancien membre de l?ALN évoque et dénonce les pressions subies de part et d?autre pour éviter l?éclatement de la vérité sur ce dossier brûlant. InfoSoir : Comment qualifier et expliquer l?interdiction de votre dernière conférence de presse à l?hôtel Es-Safir par le wali d?Alger ? Mustapha Boughaba : Ils ont agi de la sorte, car ils ont peur que la vérité éclate. Ces responsables savent pertinemment que nous possédons des pièces qui prouvent la fraude et la falsification des dossiers dans les hautes instances de l?Etat. Vous semblez détenir un nombre important de preuves, peut-on savoir le nombre de documents en votre possession ? Ce n?est pas une question de nombre. Le problème est que ces dossiers portent préjudice à l?Etat algérien. Nous avons des dizaines de dossiers qui incriminent des responsables détenant des postes clés. C?est grave, c?est pour cela que nous voulons remettre les pièces entre les mains du président de la République, pour qu?il puisse voir l?ampleur du trafic. Mais, à ce jour, nous n?avons eu affaire qu?à des généraux, dont le responsable des renseignements qui nous a délégué des officiers supérieurs de la présidence à plusieurs reprises. Ces derniers nous ont réclamé une plate-forme de revendications, ce que nous avions établi et déposé auprès des autorités concernées, il y a presque une année. Nous avions même émis des propositions de sortie de crise. Cependant, nous n?avons pas encore atteint le premier magistrat du pays. Depuis la médiatisation de votre affaire, les choses n?ont pas vraiment évolué, vous êtes toujours au stade du discours et des menaces de révélations fracassantes, alors que l?Etat vous tourne le dos. Votre association mise sur le mystère depuis 1998, pourtant, à chacune de vos sorties, vous tenez le même discours ! Nous avions donné aux autorités un délai jusqu?au mois de mars prochain pour qu?elles réagissent et prennent les mesures adéquates, sinon, nous porterons cette affaire aux instances internationales. Nous n?avons pas d?autre choix. Si nous sommes des menteurs, pourquoi alors l?Etat ne fait rien pour mettre un terme à cela ? Croyez-vous que si l?actuel ministre avait des preuves contre nous, il nous aurait épargnés !? Il serait resté les bras croisés !? Il aurait pu déposer plainte contre nous, pour avoir porté préjudice à son département et à sa personne. En 2002, je l?avais même accusé d?être un faux moudjahid. Je pensais qu?il démissionnerait d?emblée, mais ce ne fut pas le cas. Il sait que nous sommes responsables de nos dires et que nous sommes prêts à aller plus loin. Mais tout le monde se demande pourquoi vous tardez à faire vos révélations et à rendre publique la liste que vous prétendez détenir ? Je crois que lorsqu?un ministre est accusé et qu?il ne réagit pas, l?heure est grave. C?est pour cela que je n?ai pas révélé les noms des responsables impliqués. Je suis certain qu?ils ne réagiront même pas, ils attendront que l?orage passe. Nous voulons remettre la liste entre les mains du président. Ben Bella a déclaré sur la chaîne El-Djazira, que la révolution a été détournée de ses objectifs lors du Congrès de la Soummam, moi j?ai d?autres preuves certifiant que Ben Bella n?a livré que la moitié de la vérité. Lorsqu?il a été emprisonné, j?ai vu ce qu?il n?a pu voir. Portez-vous les mêmes accusations que Mellouk ? Mellouk a montré du doigt 60 magistrats. Aujourd?hui, plus de la moitié est décédée et les autres sont à la retraite. Moi je dénonce 600 000 faux moudjahids ! Il a divulgué sa liste au moment où l?Algérie avait besoin de calme. C?était en 1992, lors de la création des camps du Sud, l?interruption des élections et l?arrivée de Boudiaf. Notre pays était sur un chaudron. Poussé par je ne sais qui, Mellouk a trouvé le moyen de brûler encore l?Algérie. Pourquoi le silence des autorités alors ? Le ministre est influent, c?est un membre actif au RND, particulièrement au comité central. C?est la loi de la mafia politico-financière qui l?a imposé. Pourquoi ne veut-il toujours pas ouvrir le débat et discuter du problème ? Le président de la République a évoqué ce dossier au début de son mandat, il connaît l?influence de ces gens sur les décisions de l?Etat. Je tiens à signaler aussi que nous souhaitons seulement épurer nos rangs. L?espace des vrais résistants a été pollué, nos actions sont une aide aux instances en place pour bien diriger le pays.